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 La Guilde des Assassins

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MessageSujet: La Guilde des Assassins   La Guilde des Assassins I_icon_minitimeMar 10 Mai - 18:38:45

Et oui, je sais, quel titre euh... assassinant. M'enfin, j'avais pas vraiment d'autre idée, étant donné que c'est le titre de la partie 1. J'ai décidé d'explorer un peu plus profondément mon côté "baston" humaine (étant donné que d'habitude c'dst avec ces chats). Si vous avez des commentaires désagréables, des critiques, des "argh" écoeurés, des cris d'horreurs, et peut-être même quelques évanouissement par tant de nullité, je vous en prie, c'est par ici(cliquez sur le lien). Ah, oui, j'allais oublier ; vous pouvez aussi dire que c'est plus ou moins comestible. Quoique....



Carte de Kaïdza:

TABLE DES MATIÈRES

CHAPITRE 1 : La Trappe
CHAPITRE 2 : Zoltan
CHAPITRE 3 :Le Château
CHAPITRE 4 : L'Évaluation
CHAPITRE 5 :L'Arme d'un Assassin
CHAPITRE 6 : Arc & Flèches
CHAPITRE 7 :Objets Volants Non Identifiés
CHAPITRE 8 : Au Galop sur la Plaine
CHAPITRE 9 1/2 : Fuites
CHAPITRE 9 2/2 : Fuites
CHAPITRE 10 : Bélakel
CHAPITRE 11 : Zara
CHAPITRE 12 : Le Départ
CHAPITRE 13 : Mankel
CHAPITRE 14 : Tuma (à venir)
CHAPITRE 15 : Fâcheuse Position (à venir)

______________
PARTIE 1

CHAPITRE 1 : LA TRAPPE

Lucie bâilla longuement. Que celui qui avait inventé l'étude du milieu soit maudit ! Avec quatre heures par semaine, c'était quasiment une insulte faite aux élèves.
La cloche sonna, bénédiction tant attendue. Aussitôt, une marée d'élèves en folie dépassa le professeur, planté au milieu de la classe désormais vide. Il n'avait même pas eu le temps de finir de dicter les devoirs.
Lucie suivit le mouvement, se dirigeant tranquillement vers sa maison. Ses parents rentreraient sans doute tôt. Ils ne semblaient pas très intéressés par leur progéniture, pour ainsi dire pas du tout. Lucie n'avait ni frère ni sœur, , et ses parents avaient toujours été distants avec elle. Elle ne se souvenait même pas d'avoir jamais parlé plus de quelques minutes avec eux ! Elle avait parfois le sentiment qu'ils n'étaient pas ses vrais parents, mais repoussait aussi vite cette idée, honteuse.
Sortant de l'école, elle suivit la rue, dont le bruit et l'animation diminuaient au fur et à mesure qu'elle avançait. Un chatouillement au creux de la nuque l'alerta. Quelqu'un l'épiait. Elle pressa le pas et tourna au coin de la rue, espérant que le regard allait la lâcher. Mais elle se sentait de plus en plus tendue, oppressée presque. Elle assura son sac à dos sur ses épaules, et accéléra encore. Elle quitta le quartier des grands buildings pour celui de coquettes maisons. Séparées entre elles par de grands jardins, elles étaient sous l'ombre du soleil couchant, qui provenait de la droite, à cause de maisons deux-façades bouchant l'horizon.
Un bruit de course la fit sursauter. Elle se retourna.
Personne.
Pourtant, les pas étaient toujours présents.
Mais jusqu'au bout, la rue était déserte, car il était tard. Les gens étaient rentrés chez eux, harassés par leur longue journée de travail et heureux de retrouver le cocon familial.
Un bruit de tuile lui fit tourner la tête vers la rangées de maisons.
Bien qu'aveuglée par la lumière rouge du soleil couchant, Lucie ne pouvait pas se tromper : la silhouette encapuchonnée de vert et de rouge qui marchait au même rythme qu'elle était bien humaine.
Lucie ne put retenir un petit cri de terreur lorsque l'inconnu bondit dans sa direction. Elle esquiva souplement l'attaque et se mit à courir sans demander son reste. Si elle pouvait atteindre le bus qui stationnait au bout de la rue...
Mais l'autre n'allait pas abandonner aussi facilement, et se jeta à la poursuite de Lucie, grignotant petit à petit la direction qui les séparait.
Lucie fit un grand bond, posa un pied dans le bus en dégainant son abonnement alors que la porte se fermait déjà. Avant de s'asseoir, elle se retourna et vit son poursuivant, planté au milieu du trottoir, qui fixait le bus comme si il regardait un monstre.

*

En descendant du bus, devant chez elle, Lucie s'aperçut qu'elle venait de se faire courser dans la rue par un inconnu armé jusqu'aux dents... et qu'elle n'avait pas encore appelé la police ni fait de crise de larmes.
Elle avait toujours été une "dure", comme on disait dans son collège, même si elle n'avait jamais rien fait pour mériter ce titre. Elle n'éprouvait pas un goût partculier pour la violence, mais elle avait déjà dû faire sauter quelques dents pour se défendre.
Elle déverrouilla la porte, entra, la ferma et laissa tomber son sac dans un coin. Le vendredi était décidément un jour béni !
Mais ses parents auraient dû être là, l'un à lire son journal, l'autre à préparer le dîner. La maison était déserte.
Lucie pénétra dans le salon. La télévision était en veille.
Ce fut la première chose qu'elle remarqua. En effet, jamais, au grand jamais, ses parents n'auraient laissé la télévision allumée sans la regarder. Ils étaient tous deux écologistes jusqu'au bout des ongles, et Lucie devait avouer que cela lui portait parfois sur les nerfs.
Elle prit la télécommande, alluma la télévision. La porte d'entrée, grande ouverte, apportait une petite brise agréable dans la chaleur torride de la maison.
Sur l'écran, le visage de la grand-mère de Lucie, Andromède, apparut.
La jeune fille cligna des yeux et les rouvrit. Elle devait rêver. Sa grand-mère était morte depuis plusieurs années !
Pourtant, c'était bien elle, avec son nez en forme de bec dont Lucie avait hérité, ses yeux malicieux comme ceux d'un renard et son doux sourire.
"Ma Lucie chérie, commença la vieille dame aux cheveux chignonnés, si tu vois ceci c'est que j'ai échoué. Je suis désolée, je ne voulais pas t'impliquer là-dedans... Ils ont dû te retrouver. À partir de maintenant, ne fait confiance à personne dans ce monde."
Dans ce monde ? Qu'est-ce que cela pouvait-il bien dire ? Depuis quand existait-il plusieurs mondes ?
"Ne te pose pas de questions, va au grenier. Tu y verras une malle en bois qui semble ancienne. Au fond il y aura une trappe. Tu l'ouvriras, et tu t'y glisseras en refermant bien le couvercle derrière toi, surtout ! Tu devras dire à la première personne que tu rencontreras que tu es Lucifer, et que c'est Denyelle qui t'envoie. On t'expliquera alors tout. Quoique tu apprennes là-bas, sache que je t'ai toujours aimée, et que je voulais te protéger."
L'écran se couvrit de neige blanche, puis s'éteignit d'un claquement sec.
Lucie se racla la gorge, indécise. Ses parents avaient disparu, et sa grand-mère, - morte, qui plus est – venait de lui dire qu'elle était en danger et qu'elle devait fuir.
Un coup de vent plus fort que les autres lui ébouriffa les cheveux.
En rentrant, elle avait fermé la porte.
Et elle était ouverte.
Lucie ferma les yeux une fraction de seconde, le temps de laisser un plan se former dans son esprit.
Les muscles tendus, elle se tourna vers l'escalier vieillot qui tranchait avec la décoration moderne.
Elle gravit les escaliers quatre à quatre, mais le plus silencieusement possible, terrifiée à l'idée de percevoir les pas de l'inconnu de kaki et de rouge.
La respiration haletante, elle tourna sur le palier et se dirigea vers l'escalier du grenier, qui était obstruée par une lourde porte de bois. Priant pour qu'elle ne grince pas, Lucie poussa le battant du bout des doigts....
Et un immense craquement fit trembler la maison.
La jeune fille se jeta alors dans l'escalier en claquant la porte derrière elle. Puisqu'elle était repérée, autant prendre de l'avance.
Un petit courant d'air la fit frissonner, et elle jeta un coup d’œil en arrière.
Comment pouvait-il déjà être là ?
Elle se rendit compte qu'il ne faisait pas un bruit en montant derrière elle, qu'il semblait être une ombre...
La porte du grenier s'ouvrit avec difficulté, gorgée d'humidité. Lucie dû la finir d'un coup de pied bien ajusté, et se rua à l'intérieur de la pièce.
La malle était là, trônant au milieu. La jeune fille fit sauter le cadenas d'un coup de pelle, ouvrit le couvercle et tira le verrou de la trappe, qui s'ouvrit facilement. Elle souleva le battant de planches...
Une échelle descendait jusqu'au sol dallé de pierres.
Lucie n'hésita pas. Elle entra dans la malle, se retourné pour pouvoir s'aggriper à l'échelle, ayant du même coup une vue vers l'entrée du grenier.
Il était là, une arbalète dans chaque main.
La jeune fille ne demanda pas son reste, et se laissa glisser le long de l'échelle, alors qu'une douleur cuisante lui déchirait l'épaule.
Elle atterrit à genoux dans une grande pièce aux murs de pierres taillées.
Quinze carreaux d'arbalète sifflèrent, tirés par des silhouettes, elles, de noir et d'argent.


Dernière édition par Reflets de Lune le Dim 13 Mai - 17:26:56, édité 13 fois
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MessageSujet: Re: La Guilde des Assassins   La Guilde des Assassins I_icon_minitimeMer 18 Mai - 18:45:14

CHAPITRE 2 : ZOLTAN

Lucie ferma les yeux, persuadée que sa fin était proche.
Ca y est, se dit-elle. Je meurs alors que je n'ai rien fait d'intéressant, ni rien appris, ni rien d'autre en fait, dans ma vie.
Ce qui n'était pas totalement vrai. À dix-sept ans, la jeune fille avait disposé d'une tonne de livres sur tous les sujets, plus particulièrement sur le Moyen Âge qui la fascinait. Elle avait pris des cours de tir à l'arc, gagné plusieurs compétitions. Elle montait, à cheval depuis plusieurs années, et disposait d'une intelligence exceptionnelle.
Lucie ouvrit les yeux, pour les refermer aussitôt. Au moins, elle n'était pas morte. C'était toujours ça de gagné. Mais vu comment les murs et le sol tanguaient, un véritable évanouissement n'allait sans doute pas tarder.
Au prix d'un effort surhumain, Lucie souleva les paupières. Elle avait l'étrange impression que son épaule était partie, comme arrachée.
Les vapeurs de l'évanouissement prévu depuis quelques instants la submergèrent enfin. La vue brouillée, la jeune fille s'effondra par terre.
*
Lucie ouvrit les yeux sur un plafond de bois soigneusement verni et sculpté. Son épaule la faisait atrocement souffrir, mais quelqu'un y avait posé un habile bandage, bien que d'une couleur douteuse.
Prenant appui sur une seule main, la fille se releva, regardant autour d'elle avec étonnement.
Elle était dans un lit au draps blancs compris dans une longue rangée de couchettes toutes identiques, dont pas une n'était occupée. Tout au fond de la salle, une petite porte, qui s'ouvrit quelques instants plus tard.
Une dame d'âge mûr s'avança. Elle était grande et grosse, le teint hâlé, les cheveux brun-roux relevés en une coiffure ridiculement compliquée. Son petit nez retroussé surmontait une bouche en cœur aux lèvres soigneusement peintes en rouge vif. Seuls ses yeux dénotaient vraiment dans cet attirail assez hétéroclite ; grands, verts, en forme d'amande, avec de longs cils noirs. On les aurait mieux imaginés sur le minois d'une actrice célèbre.
"Ah, vous êtes réveillée", lâcha-t-elle.
Lucie regarda autour d'elle, mais il n'y avait personne. Après avoir remarqué que la femme l'observait, elle en conclut que c'était à elle qu'elle s'adressait. Personne ne l'avait jamais vouvoyée.
"Je suis Dame Pervenche, continua l'inconnue, et je suis l'infirmière du château. Ne bougez pas, Zoltan viendra vous parler."
De toute façon, Lucie n'avait pas tellement le choix. Il lui restait tout de même plusieurs points à éclaircir. Premièrement, on l'avait bandée d'une main experte, mais... les les bandes semblaient sorties d'un autre temps. Cette Dame Pervenche semblait coiffée comme si elle datait du Moyen Âge. De plus, elle avait parlé d'un château... Était-il possible que...
Soit elle était tombée chez un vieux fou riche, soit elle était devenue complètement idiote. Elle aurait préféré pencher pour la première solution mais tout de même...
Avant qu'elle ait eut le temps de clarifier ses pensées, la porte s'ouvrit de nouveau, et celui qui devait être Zoltan – quel nom étrange – fit irruption.
Il était assez petit, mais il paraissait beaucoup plus grand, grâce à une sorte de puissance contenue émanant de lui. Il portait des vêtements totalement noirs mais bizarres. Ses grandes bottes en cuir lui remontaient jusqu'au dessous des genoux, et il semblait porter des armes partout où c'était possible. Des armes plutôt étranges, d'ailleurs, des poignards, une épée, tout ça dans un style assez moyenâgeux.
Ses yeux ambrés et malicieux, tels ceux d'un renard, observaient Lucie avec attention. Son nez pointu surmontait une bouche aux lèvres minces, tandis qu'une crinière de cheveux noirs désordonnés dissimulait ses oreilles. Il ressemblait à un goupil en vadrouille.
"Qui es-tu ?" demanda-t-il sans préambule, l'air presque menaçant.
Tu devras dire que tu es Lucifer, et que c'est Denyelle qui t'envoie.
"Je... euh... je suis Lucifer, et c'est Denyelle qui... euh.. qui m'envoie", dit Lucie, sa voix baissant au fur et à mesure de la phrase.
Enfin, je crois, pensa-t-elle.
"Denyelle, tiens donc... murmura l'homme, les sourcils froncés. Que s'est-il passé ?
- Que s'est-il passé quoi ?
- Avant d'arriver ici, que s'est-il passé ? Dans ton monde ?
- Attendez, vous voulez dire que... Que..."
C'était tellement énorme que Lucie n'arrivait même pas à formuler la phrase.
"Que tu es dans un autre monde, oui, sur Kaïdza, s'impatienta Zoltan. Alors ?
- Euh... Quand je suis rentrée chez moi... Y'avait un mec habillé bizarrement, là, qui me suivait.
- La couleur ? L'interrompit Zoltan. Quelle était la couleur de ses vêtements ?
- Vert et rouge", fit Lucie, intriguée.
Zoltan ne répondit rien, ma sa mine s'assombrit.
"Alors il a essayé de me sauter dessus, ce que j'ai pas trop apprécié, comme on peut s'en douter. Du coup j'ai couru, et j'ai réussi à attraper le bus..."
Elle le fixa quelques instants. Connaissait-il le sens du mot bus ? Il dû comprendre son trouble, car il lâcha :
"Oui, un bus, un gros truc jaune avec marqué TEC en rouge et qui fait vroum-vroum.
- Oui, donc, j'ai réussi à monter dedans, alors il a arrêté de me suivre. Enfin, il aurait eu du mal à me suivre en courant de toute façon. Bref, je suis arrivée chez moi, et la télévision était allumée. Y'avait le... Le visage de ma grand-mère qui m'a dit de monter au grenier parce que j'étais en danger, et tout ça et tout ça... Et puis, le gars a rappliqué... Donc je me suis dépêchée d'aller au grenier, puis j'ai ouvert la trappe. Et là il m'a lancé un truc dans le bras, et je signale – en passant - que ça fait vachement mal. Et donc je suis tombée en plein milieu d'une petite réunion de famille, dont les gens ont tiré sur le mec qui me poursuivait. Sympa de leur part, d'ailleurs, vous devriez penser à les augmenter. Et puis voilà, y'a cette espèce de bonne femme qui m'a dit que vous viendriez me parler. Et d'ailleurs, où est-ce qu'on est ?
- Plus proche de chez toi que tu ne l'as jamais été..."
*
"Euh... C'est-à-dire ?
- Bon, en fait, pour faire simple, je vais te faire un petit résumé géopolitique de la situation. Nous nous trouvons actuellement sur Kaïdza, seul continent de la planète, à moins que tu ne sois douée d'ubiquité. La capitale est Bélakel, très connue pour ses armures ultra-résistantes. Il existe des passages, que l'on appelle "portes" entre ton monde et le mien. Cependant, le pays est gouverné assez bizarrement (enfin, de ton point de vue) ; dans le sud-ouest, près de Tuma (une cité fortifiée cachée au milieu de la forêt), il y a le Seigneur Tenkin, dont le grand rêve serait de gouverner Kaïdza tout entier, et la Terre, en passant. Son parti politique défend donc le fait de se glisser par les portes et d'aller tuer des gens dans ton monde. Quel hobby utile et intéressant. Le parti dont je fait partie désire au contraire que les Terriens n'apprenent jamais l'existence de Kaïdza. Le problème, c'est que la politique n'est pas de tout repos par ici. Tenkin s'est donc fabriqué une armée de soldats, nommés les Gardiens, (parce qu'ils gardent – soi-disant – Tuma). Bref. Ils sont rompus à toutes techniques d'assaut. Ils sont habillés de vert et de rouge – le rouge symbolisant le sang, et le vert la perfidie – et je craint que l'un d'eux n'ait essayé de te tuer. De notre côté, nous ne sommes pas restés inactifs et avons formé la Guilde des Assassins. On aurait préféré avoir un nom un peu plus pacifique, mais finalement, c'est celui-ci qui a été désigné. Pourquoi ? Parce que, finalement, on finit toujours par se "débarrasser" des ennemis. En plus, les gens du peuple nous connaissent sous ce nom depuis que les Gardiens répandent des rumeurs infondées, comme quoi on assassinerait toutes les personnes dont la tête ne nous revient pas."
Il s'interrompit, le temps de reprendre son souffle.
"Nos Assassins sont, eux, habillés de noir et d'argent. Le noir pour pouvoir se dissimuler, se fondre dans les ombres, et l'argent parce que c'est presque aussi bien que l'or, mais c'est quand même bien moins cher.
"À la base, nous voulions juste nous défendre, mais comme on dit, la meilleur défense c'est l'attaque.
"Pour en revenir à toi, tes parents étaient les dirigeants de notre parti avant que j'en prenne la tête. Tenkin les a capturés? Nous t'avons donc cachée sur Terre, pour ne pas qu'il te retrouve, et, accessoirement, que tu ne meure pas bêtement dans d'atroces souffrances. Car Tenkin garde tes parents en vie pour te retrouver. Si il te capture, je peux te garantir que ta vie ne durera pas plus longtemps.
- Oui, tout de suite, c'est assez ennuyeux.
- En effet, surtout de ton point de vue. Bref, ta grand-mère était en effet Denyelle Drake. Chaque Assassin porte un nom de code, et celui qui t'a été donné à la naissance est Lucifer.
- Je veux récup...
- Oui, tu veux secourir tes parents., l'interrompit Zoltan. Je savais que tu allais dire ça.
- ... et je veux le faire moi-même.
- Je m'en doutais aussi. Étant donné que si je ne t'y autorises pas, tu irais quand même et te ferais tuer en moins de trente secondes, je t'en donne l'autorisation.
- De toute...
- Mais, et il y a un très grand mais, poursuivit Zoltan comme si de rien n'était, je veux d'abord que tu suives un entraînement spécial. C'est ici, à Sennal, qu'il te sera dispensé, étant donné que c'est ici que l'on forme les Assassins.
- Vous voulez dire que...
- Que tu vas devenir une des leurs ? Tout dépendras de toi, de ta ténacité et de ta détermination. En attendant, Enzo va te faire visiter le château."
Il ouvrit la porte, sortit, et un grand garçon déguingandé fit irruption dans la pièce. Le regard bleu, les cheveux blonds et un franc sourire aux lèvres, il devait charmer toutes les filles.
"Bonjour ! Lança-t-il. Tu dois être Lucifer. Ou plutôt Lucie. Je suis Enzo, et Zoltan ma chargé de te faire visiter Sennal.
Il aida Lucie à se lever en la tirant par son bras valide. Elle découvrit alors avec étonnement qu'elle était vêtue d'une tunique sans manches lui tombant jusqu'aux genoux, fendue jusqu'à la taille afin qu'elle puisse courir. Elle portait e-dessous un large pantalon noir. Deux grandes bottes à rabats – à sa pointure – l'attendaient au pied du lit. Elle les chaussa, et remarqua agréablement qu'elles étaient très confortables.
Enzo la contempla avec amusement, puis se dirigea vers la porte. Il la lui tint ouverte,la laissa passer puis la suivit en fermant soigneusement le battant.
Lucie inspira un grand coup. Son bras la lançait atrocement, mais, étrangement, elle se sentait... dans son élément.


Dernière édition par Reflets de Lune le Mer 3 Aoû - 12:34:17, édité 3 fois
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MessageSujet: Re: La Guilde des Assassins   La Guilde des Assassins I_icon_minitimeLun 20 Juin - 17:39:40

CHAPITRE 3 : LE CHÂTEAU

"Nous sommes en fait au rez-de-chaussée. Ici, la porte en face, c'est la salle à manger..."
Enzo ouvrit la porte en question. La salle devait faire une fois et demie la surface de l'infirmerie. Elle était meublée de longues tables entourées de chaises et de tabourets. Le sol, carrelé de grandes dalles de pierre grise irrégulières, avait été soigneusement lavé.
Enzo referma la porte, et les deux jeunes gens poursuivirent leur chemin le long du couloir au tapis rouge.
"Ici, commenta-t-il en ouvrant une autre porte, l'endroit le plus intéressant : les cuisines. Et en face, la salle d'entraînement : Zoltan dit que c'est pour brûler les calories."
À l'intérieur, des dizaines de personnes, deux par deux, s'affrontaient à mains nues ou dûment armés. Au fond, des lanceurs de couteaux plus ou moins doués tiraient dans des cibles... ou sur eux-mêmes. Les plus habiles visaient des mannequins de paille, tentant sans doute de toucher les parties vitales.
La porte suivante était celle de Zoltan, le maître des lieux : personne n'y mettait les pieds sans en avoir reçut l'autorisation, autant par politesse que par prudence.
Lucie et Enzo traversèrent le hall d'entrée et pénétrèrent dans une salle aux dimensions plus modestes que les précédents mais tout de même spacieuse.
"L'armurerie, expliqua Enzo. On y entrepose toutes les armures sans possesseurs attitrés. Comme dans la salle d'armes, en fait."
Mais Lucie ne pouvait pas détacher les yeux du spectacle qui s'offrait à elle. Sur tous les murs, sur tous les îlots centraux, sur tout l'espace disponible étaient entreposées des pièces d'armures les plus diverses : des brassards d'aciers, des gantelets de mailles, des spallières*, des armures de cuir...
" Vous... Vous portez vraiment tout ça ? Souffla Lucie.
- Nous, non. Pas les apprentis, expliqua Enzo en voyant l'expression perplexe de son amie. Les Assassins diplômés, si je peux dire, sont assez paranoïaques et portent leurs armures en permanence. Mais généralement, tout cet attirail est dissimulé sous une cape..."
Il désigna le mur auquel ils tournaient le dos. Sur celui-ci, accrochés par des rivets directement plantés dans le mortier entre les pierres, une grande pièce de tissu noir était accrochée. Lucie remarqua que c'était exactement les mêmes que ceux du maître des lieux. Mais a présent, elle pouvait mieux les voir.
Un grand pantalon de toile était surmonté d'une chemise elle aussi noire, comme tout le reste. Une cape étrange, sans doute celle dont parlait Enzo, était repliée. Elle avait deux manches larges et deux attaches d'argent sur le devant. Un profonde capuche complétait l'ensemble, si profonde qu'elle devait sans doute permettre de passer inaperçu... du moins au milieu d'une foule.
"La cape, expliqua Enzo, enfin les manches, c'est pour pouvoir combattre plus facilement quand il pleut. Avec... - Il l'entraîna vers la pièce suivante. - ça."
Ça, c'était une réserve d'arme tellement énorme qu'elle en était indescriptible. Cela allait de l'épée ornementée au simple poignard, en passant par les étoiles de jet et les arcs à flèches.
"Wow, souffla Lucie. Vous utilisez vraiment tout ça ?"
Elle avait l'impression de répéter toujours les mêmes questions mais en changeant seulement quelques mots à chaque fois.
"Non, pas tout, sourit Enzo, amusé. La plupart d'entre nous n'en maîtrise qu'une dizaine. Mais quand je dit maîtriser, on ne pas pas aller plus loin...
- Et je vais vraiment devoir apprendre à me servir de... ça, par exemple ? Demanda-t-elle en désignant une énorme hache à double tranchant.
- Ça m'étonnerait. Tu as l'air plutôt légère, mais rapide, tu te cantonneras sans doute à des armes requérant moins de force brute. Ce genre de hache, c'est plutôt pour les gros musclés. Je t'avoue que je t'imagine assez mal avec une massue.
- Moi non plus", admit la jeune fille en tordant la bouche.
Il sortirent et se dirigèrent vers l'escalier. Une fois arrivés en haut, Lucie découvrit un long couloir menant jusqu'au fond du bâtiment, percé à intervalles réguliers de plus petits couloirs menant sur la gauche.
"Tu visiteras la cour plus tard. Pour l'instant, je vais te montrer ta chambre", dit le garçon.
Il suivirent la galerie et tournèrent à l'un des embranchements absolument identique aux autres. Désormais, c'étaient des portes qui se succédaient le long des murs. Elle portaient des plaques gravées de noms étranges et inconnus : Arya, Omorphès, Baréton... Des noms qui n'étaient pas sans rappeler la langue grecque à Lucie.
Ils passèrent devant un battant portant le nom d'Enzo, et s'arrêtèrent à la suivante : sur la plaque d'argent était gravé le nom de Lucie.
"C'est ta porte, dit Enzo. Comme tu peux le remarquer, tu étais attendue. Nous utilisons généralement des pseudonymes en dehors de Sennal, mais ici il n'y a aucun risque."
Suite à ces mots, il ouvrit le battant. Les meubles étaient rustiques mais agréables, et le lit avait l'air moelleux. Enzo s dirigea vers la table, et brandit un parchemin manuscrit.
"C'est tes instructions pour demain. Tu commences avec... ah oui, moi aussi j'ai eu ça. Évaluation des compétences dans la salle d'entraînement.
- Qu'est-ce qu'ils pourraient évaluer ? Je n'ai absolument aucune compétence.
- Tu as sûrement des talents cachés... Euh...
- Écoute, je n'ai jamais touché le moindre objet tranchant à part un couteau à pain.
- Forcément, ça limite...
Ils échangèrent un silence gêné, puis Enzo renifla soudain l'air ambiant.
"C'est l'heure du dîner. Tu viens ?
- Oui, je te suis."

*

Le repas, succulent et copieux, apaisa les grondements de l'estomac de Lucie. Comme il était déjà tard, elle décida d'aller se coucher pour être en forme pour le lendemain.
À peine avait-elle posé la tête sur l'oreiller qu'elle sombra dans le sommeil.




Dernière édition par Reflets de Lune le Mer 3 Aoû - 12:34:12, édité 2 fois
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MessageSujet: Re: La Guilde des Assassins   La Guilde des Assassins I_icon_minitimeSam 25 Juin - 8:59:20

CHAPITRE 4 : L'ÉVALUATION

Lucie s'éveilla spontanément au petit matin. Pestant contre le fait qu'en la période du Moyen Âge (ou ce qui y ressemblait), il n'y avait pas de chauffage, elle s'habilla rapidement. Alors qu'elle terminait d'ajuster ses bottes, elle remarqua un petit miroir. Elle s'en approcha et se dévisagea sans indulgence.
Deux grands yeux verts pailletés d'or l'observaient avec attention. On racontait que les paillettes étaient le signe d'une alliance avec le Diable... Son visage mince était encadré de longs cheveux châtains. Son nez, un peu trop fort à son goût, la faisait parfois ressembler à une sorcière.
Trois coups frappés à la porte la firent sursauter. Lucie se dépêcha d'aller ouvrir, et ce fut Enzo qu'elle trouva. Il l'emmenait déjeuner, puis il lui indiquerait là où elle devait se rendre.
La jeune fille se dépêcha de manger deux tartines au miel des bois, puis se précipita vers la salle d'entraînement, craignant d'être en retard. Elle n'avait jamais porté de montre dans l'autre monde, et ici elles n'existaient pas.
À son grand étonnement, c'était Zoltan qui l'attendait. Planté au milieu de la pièce, il lui sourit et lui fit signe de s'approcher. Elle obéit, et remarqua alors le monceau d'armes diverses au milieu duquel il se tenait.
"Bonjour, Lucie. Cette séance... d'essai est là pour voir avec quelles armes tu es la plus douée, et donc avec lesquelles tu t'entraîneras. Celles-ci viennent de la réserve du château, donc merci de ne pas les abîmer."
Lucie ne répondit rien, mais pensa que c'était elle qui allait être abîmée.
"Je te propose de commencer par un peu de tir à l'arc, continua Zoltan en désignant le carquois et l'arme. Tu dois tirer dans la cible."
La précision était-elle par prudence, ou juste parce qu'il ne voulait pas terminer avec une flèche dans l'oreille ? Lucie essaya plutôt de se concentrer pour ne pas se tirer dessus, au lieu de réfléchir au sens caché de paroles qui n'en avaient sans doute pas.
La cible en question se trouvait à une dizaine de mètres. Des cercles rouges, noirs et jaunes délimitaient les parties à atteindre.
"Je ne peux rien t'expliquer. À toi donc de me montrer ce que tu sais faire."
Lucie acquiesça, saisit l'arme et se mit en position. Quelques années plus tôt, elle avait pris des cours de près de chez elle. L'entraînement allait donc peut-être porter ses fruits, ce qui serait bien pour remonter dans l'estime de Zoltan quand il aurait vu le résultat avec le reste de son matériel.
Imaginant une ligne jusqu'à la cible, la jeune fille plaça un pied de chaque côté, perpendiculaires l'un à l'autre. Le buste face au cercle, elle plaça une flèche sur la corde, tendit celle-ci et visa soigneusement en retenant son souffle. La douleur de son bras blessé se rappela trop vite à elle, et elle lâcha la corde, pressée de soulager ses muscles. La flèche alla se planter avec un bruit mat à quelques centimètres de la zone noire symbolisant le centre.
"Pas mal", lança Zoltan. Avec un peu d'entraînement, ça devrait passer.
Lucie se renfrogna. Ce devait être son meilleur tir, et voilà tout ce qu'il lui valait ! Mais Zoltan ne lui laissa pas le temps de réfléchir, et lui lança une épée que la jeune fille attrapa de justesse, en ployant légèrement sous le poids de l'arme et de son fourreau. Le maître des lieux tiré son propre sabre, et se mit en garde.
"Mais que vaux-tu à l'épée ?" lui demanda-t-il avec un sourire malicieux.
Lucie tira l'arme de son étui, surprise par la brillance de la lame. Elle soupesa l'épée, l'ajusta à sa main, puis plia légèrement les genoux. Voyant que l'homme ne bougeait pas, elle l'attaqua d'une main hésitante, peu sûre d'elle. Il para facilement le coup, lui donna un coup de pommeau sur le bras et l'envoya bouler à plusieurs mètres.
La jeune fille, furieuse, se redressa avec difficulté et le toisa plus attentivement. Elle s'avança vers lui très lentement, prudente, puis se détendit d'un coup en projetant son bras armé vers l'avant. Zoltan s'écarta d'un pas, glissa sa lame sous la sienne et tourna la main. La poignée échappa à Lucie.
Une fois encore, elle se baissa pour ramasser son arme, qu'elle empoigna cette fois des deux paumes. Elle visa les jambes de son adversaire, qui la bloqua d'un revers, jetant à moitié Lucie. Il retira sa lame d'un mouvement brusque, l'attrapa par le bras et la releva, lui remettant son épée en main. Il serra ses doigts dessus, lui tourna les épaules de façon à ce qu'elle soit placée perpendiculairement à lui, puis se remit en garde.
"N'essaye pas de m'attaquer ! Lança-t-il. Attaque-moi !"
Lucie prit une grande inspiration, et releva son épée, prenant ainsi sans le savoir une parfaite garde. Elle fronça les sourcils pour chasser la sueur qui lui brouillait la vue, rejetant ainsi ses cheveux devant son visage. Elle les repoussa d'un mouvement de tête, se promettant intérieurement de s'attacher la chevelure la prochaine fois. Si il y avait une prochaine fois.
Cette fois, l'affrontement dura plus de quelques secondes. Lucie feinta vers la droite, puis obliqua brusquement vers la gauche. Zoltan n'avait pas été pris au piège, mais était suffisamment dérouté par sa soudaine stratégie pour lui laisser une chance de ne pas se faire jeter au sol. Tout en agitant sa lame vers la gauche, la jeune fille lui décocha un coup de pied dans le tibia. Il ne sentit rien, et Lucie se maudit de n'avoir pas vérifié si il avait des jambières. Elle grimaça, puis se reprit. Elle devait pouvoir faire quelque chose.
Elle fit alors quelque chose de très stupide, à savoir qu'elle se jeta en avant sans aucune idée précise de quoi faire. Une demi-seconde plus tard, elle s'arrêta devant Zoltan, lui fit coucou de sa main libre, puis essaya de le frapper aux côtes. Il arrêta sa lame du bras, son canon d'avant-bras* produisant un petit bruit métallique.
"Et bien, on pourra sans doute faire quelque chose de toi."
Lucie, le souffle court, une douzaine de bleus en train de se former et un estafilade sur le bras, lui lança un regard noir.
"Tu avais déjà utilisé un arc, avant ? Lui demanda Zoltan.
- Oui, j'avais pris des cours dans... Dans l'autre monde.
- Ça se voit."
Lucie pensait qu'il parlait de sa façon de tirer, mais, après un bref instant, il ajouta :
"Tu n'as pas jeté l'arme et le carquois à terre après les avoir utilisés."
Très drôle, songea Lucie.
"Bien, reprit Zoltan. Passons à l'arme suivante, à savoir ceci."
Il lui tendit trois couteaux d'acier. Lorsque Lucie les posa sur son index, comme elle l'avait vu faire, elle se rendit compte qu'ils étaient équilibrés pile au centre.
"Et je suis censée faire quoi avec ? Demanda-t-elle.
- Ce sont des couteaux de lancer. Tu peux te rapprocher de la cible de l'arc, ensuite à toi de jouer !"
La jeune fille tordit la bouche, mais s'avança vers la cible sans rien dire. Elle s'arrêta à environ trois mètres, puis se mit dans la même position que pour tirer à l'arc.
Bon. Je vise, et je lance, pensa-t-elle.
Comme dans tous les films qu'elle avait pu voir, elle prit la première dague par la lame, recula le bras derrière son épaule et le projeta vers la cible en essayant de lui imprimer un mouvement de rotation.
Ce fut avec un son sourd que les trois manches allèrent percuter le mur, à une dizaine de centimètres de la cible initiale.
*
"Bon, on va passer au boomerang alors.
- Vous utilisez des boomerang ?
- Oui, c'est très utile. Ça permet d'assommer de loin des personnes... indésirables sans les tuer, et sans laisser de traces. Le plus difficile n'est pas le fait qu'il revienne vers toi, mais plutôt de correctement viser, et de le rattraper facilement."
En effet. Ce fut la seule pensée de Lucie, lorsque, après une dizaine d'essais, en ayant manqué la cible à chaque fois, s'être fait une bosse sur le front, et avoir a moitié assommé Zoltan alors qu'il se trouvait derrière elle, elle s'avoua vaincue.
"Voyons, il te reste encore l'arbalète à tester, les étoiles de jet et le poignard", dit Zoltan en consultant le tas d'armes, qui se réduisait de plus en plus.
Apparemment, il ne voulait pas renoncer.
Il mit d'autorité l'arbalète - chargée - dans les mains de Lucie, et qui visa la cible avec la plus grande concentration. Lorsqu'elle fut sûre de son angle, elle pressa la gâchette, et le carreau fila en sifflant vers la zone noire du centre.
"Et bien, voilà qui n'est pas trop mal ! Sourit enfin Zoltan en lui prenant l'arbalète, ne souhaitant sans doute pas subir de dommages collatéraux.
En échange, il lui donna quatre petites rondelles d'aciers hérissées de pointes agressives. Lucie en découvrit l'usage avant le fonctionnement, et en lança la moitié avat de se rendre compte qu'il y avait un sens, afin que les pointes se fichent dans la cible. Au lieu de glisser lamentablement.
L'une des étoiles tomba par terre après avoir rebondit sur le mur. La deuxième, lancée – encore - dans le mauvais sens de rotation, roula sur la cible jusqu'au sol. La troisième se ficha dans la cible sans aucun bruit. Mais, enfoncée trop peu profondément, elle se détacha et roula elle aussi jusqu'au sol. Le sourire de Lucie se mua en grimace. Enfin, la dernière, emportée par un saut périlleux, ricocha sur le plafond, décrivit une courbe improbable, et alla enfin se planter dans la cible – et y resta.
Mais Zoltan n'accorda aucun répit à Lucie, et lui tendit un poignard, déjà positionné dans une garde parfaite. La jeune fille prit le temps d'examiner l'arme. Sur le pommeau était gravé un petit triangle inscrit dans un cercle. Trois rayons partaient du centre du cercle pour aller rejoindre les sommets du triangle.
Lucie n'eut pas le temps de réfléchir plus longtemps : elle entama un duel acharné – et inégal – avec Zoltan.
Tournant autour d'un même point, de façon à se tenir à la même distance l'un de l'autre, les deux adversaires ferraillaient sans relâche. Zoltan avait l'avantage, mais se gardait de le pousser, attendant de voir où étaient les limites de la jeune fille.
Celle-ci, sans relâcher la tension, cogitait ferme.
Bon. Je suis loin d'être à son niveau. Très, très loin même. Qu'est-ce qu'il dirait ? De l'audace. De l'AUDACE.
Lucie bondit en avant et se reçut sur les genoux, passant ainsi sous la garde de son adversaire. Son poignard remonta, fulgurant, vers Zoltan qui releva la tête, histoire de ne pas être décapité.
Les deux s'immobilisèrent, l'une le souffle court, l'autre comme si se levait de son fauteuil.
"Bien joué."
Lucie eut l'impression de sentir une sorte de fierté dans sa voix.
"Ca, c'était audacieux. Très, même."
Il récupéra le poignard et alla le ranger, tandis que Lucie s’asseyait, toujours essoufflée.
"Alors ? Qu'est-ce que vous pensez de moi ?
- La première chose à laquelle je pense, c'est que tu ferais bien de commencer à me tutoyer, j'ai l’impression d'être vieux. La deuxième, c'est que tu te débrouilles plutôt bien pour une première fois. Mais il y a encore une chose dont je voudrais te parler...
- Quoi ? Vous... Tu ne m'as pas tout dit ?
- Si je devait te raconter en détail l'histoire de ce continent, de la Guilde des Assassins, on en aurait pour la nuit – et bien plus.
- Et donc ? C'est quoi, ce dont tu veux me parler ?
- De l'arme secrète des Assassins, bien sûr."


* Canon d'avant-bras : protection de l'avant bras.




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La Guilde des Assassins _
MessageSujet: Re: La Guilde des Assassins   La Guilde des Assassins I_icon_minitimeLun 4 Juil - 18:40:57

CHAPITRE 5 : L'ARME D'UN ASSASSIN

"De tous temps, chaque Assassin a toujours reçu, ou plutôt s'est procuré, une arme secrète. Peu de temps avant son adoubement, l'apprenti part en quête de ce que l'on appelle la Quête d'une Arme. Comme tu peux le remarquer, le nom a été mûrement réfléchi pendant de longues heures – Zoltan sourit. Il part avec une tunique et un poignard, c'est tout, à lui de se procurer le reste. Ces armes sont cachées un peu partout zur Kaïdza. On dit que c'est le destin qui pousse vers l'arme qui nous convient le mieux. Une fois le coffret contenant l'arme découvert, l'apprenti n'est pas au bout de ses peines. : en effet, l'arme est très souvent cassée ou en mauvais état de fonctionnement. On n'a jamais su pourquoi. Toujours est-il que tout est en pièces détachées. Heureusement, il y a un plan expliquant comment le réparer et à quoi cela sert, mais difficile à obtenir : en effet le parchemin est enroulé très serré dans un petit tube de pierre. Le plan est enroulé autour d'un petit tube empli d'acide. Pour ouvrir le cylindre, il faut trouver le "mot de passe", qui est la réponse de l'énigme qui l'accompagne. La réponse étant un mot formé d'un certain nombres de lettres. Une fois la réponse trouvée, il suffit de l'encoder sur les petits cylindres pivotants qui forment la paroi du tube de pierre. Si c'est le bon mot, le cylindre s'ouvre alors en deux et on peux récupérer le parchemin. Mais attention ! Cela ne sert à rien de d'essayer de l'ouvrir par la force, car si on casse le tube, la fiole d'acide se casse elle aussi, et le parchemin en est imbibé, le rendant alors illisible. Ensuite, il suffit d'apporter le plan et les morceaux d'arme à un forgeron un peu douée dans les petits mécanismes, qui peut réparer l'arme, pour en faire un exemplaire unique et sur mesure.
- Mais... Pourquoi en faire un seul exemplaire ? Demanda Lucie.
- Pour le côté pratique, parce que le métal employé pour les morceaux d'armes n'a jamais été égalé, et si on en utilisait un autre, l'objet serait très lourd et perdrait donc toute son utilité. Pour le côté moins logique, parce que c'est une tradition. Et chaque Assassin a sa propre arme, différente de toutes les autres."

*

Comme il devait être plus ou moins midi, Lucie se rendit à la salle à manger.
Trois longues tables en occupaient le centre, entourées de tabourets, de chaises et de bancs. Partout où elle regardait, tout était occupé par une foule de gens. Mais la plupart n'avaient pas l'air d'être des Assassins. C'étaient des dignitaires, des nobles, des gens habitués à être obéis, mais aussi des serviteurs, des palefreniers. Lucie comprit que, quel que soit le rang de chacun, tout le monde mangeait sur un pied d'égalité.
Les Assassins se démarquaient fortement avec cette foule colorée. Vêtus de noir, la capuche rabattue sur le visage pour la plupart bien que quelques-uns l'aie découverte, ils portaient tous leur armure, pour bien servir leur réputation de paranoïaque. Mais les non-paranoïaques ne devaient de toute façon pas faire long feu. Installés par petits groupes, un peu à l'écart des autres, ils chuchotaient doucement entre eux.
Lucie referma doucement la porte et se chercha une place des yeux. Elle remarqua Enzo, qui était assis avec plusieurs autres apprentis. Le garçon lui fit signe de la main et l'invita à s'asseoir. Il lui avait gardé une place, ce dont la jeune fille lui fut reconnaissante.
"Alors, ça a été ? Introduit-il. Comment t'es-tu débrouillée ?
- De l'avis de Zoltan, pas trop mal, répondit-elle avec une moue désabusée.
- Et du tien ?
- Totalement lamentable."
Enzo ne put s'empêcher de rire devant son visage penaud et la tête compatissante des autres apprentis, qui attendaient que Lucie poursuive.
"J'ai balancé le boomerang dans la poubelle, je me suis coupée avec une étoile de jet – elle exhiba son doigt endolori, j'ai rayé une épée en la laissant tomber par terre, et j'ai fait un trou dans la cible avec une flèche.
- Dans le dernier cas, c'est assez logique, la rassura Enzo.
- Ah, ah, très drôle.
- Mais pour le reste... Toutes mes félicitations, ma vieille.
- Pardon ?
- Il n'y a eu qu'une seule Assassin. D'ailleurs comme tu peux le remarquer, il n'y a pas de féminin. Bref, quand elle est arrivée, elle n'a même pas réussi à soulever l'épée.
- Il paraît qu'elle s'appelait... Denyelle."
Lucie se figea. Était-ce possible...
"Ouais, intervint un garçon aux longs cheveux nouées en queue de cheval et à l'air avenant, mais à force d'entraînement, elle l'a soulevée, cette épée. Et même plus. On dit que c'était une des meilleures de son temps.
- Et une de trop", grommela un garçon appelé Anontès, qui posa les coudes sur la table en la regardant d'un œil mauvais.
Lucie ne dit rien mais lui lança un regard noir. Plus personne ne décrocha un mot de tout le dîner. Il n'y avait plus rien à ajouter.

*

"On travaille par binômes, expliqua Enzo.
Après le dîner, ils s'étaient rendus à la sa&lle d'entraînement pour leur leçon d'escrime. Les autres membres du groupes étaient tous là depuis quelques mois. Enzo, le plus jeune affronterait Lucie.
Ce fut Eomen qui les accueillit. Grand, maigre, sec comme un haricot nerveux, il donnait le parfait exemple du professeur risquant à tout moment de faire une crise d'hystérie.
Il avait de courts cheveux noirs coiffés en brosse et des yeux bleu perçant. Il semblait se tenir constamment sur ses gardes, les jambes fléchies comme pour se préparer à bondir.
Les autres élèves, qui étaient ceux avec qui Lucie et Enzo avaient dîné, se ressemblaient tous : grands, musclés comme si ils passaient leurs nuit à soulever de la fonte et l'air sérieux. Seul Anontès regardait Lucie d'un air glacial.
"Bon, commença Eomen en parlant à toute vitesse. Aujourd’hui, Lucie nous a rejoint.Ou plutôt Lucifer, mais ça c'est pour l'officiel. Elle travaillera en binôme avec Enzo, ce qui signifie que vous n'avez pas à vous en soucier, ni à la maltraiter comme certaines personnes on l'habitude de le faire avec les nouveaux."
Bien sûr, il ne visait personne.
Lucifer. Ce nom semblait étrange à Lucie. Il faisait penser au diable en personne. Était-ce ce qu'elle était ? Le Diable ? Condamnée à se nourrir du malheur des autres ?
"Prenez vos armes et commencez à vous échauffer."
Apparemment, Eomen n'avait que faire de ses états d'âmes.
Il se tourna vers la jeune fille, l'attrapa par le bras et l'entraîna vers une table qui disparaissait sous les épées, tout ça d'un seul geste.
Il en prit une et la tendit à Lucie, qui eut à peine le temps de refermer les doigts sur la poignée qu'il la lui arrachait déjà. Il lui en donna une autre, qui se logea bien plus facilement dans les creux et les bosses de la main de la fille. Elle fit quelques mouvement désordonnés, avec l'impression d'être parfaitement ridicule. Malgré tout cela, l'épée lui allait parfaitement, ne semblant être qu'une extension de son bras. Légère mais solide. Eomen lui donna le fourreau et une ceinture.
L'étui de cuir s'accrochait sur l'épaule, ce qui, selon les dires de professeur, étant censé donner plus de puissance au premier coup, juste après avoir dégainé son épée. Du moins si le possesseur de l'arme arrivait à sortir son sabre et à porter le coup d'un seul geste.
L'acier chanta lorsque l'épée alla se nicher dans la place qui lui était destinée.
"Bien, poursuivit Eomen en se tournant vers le groupe. Nous allons maintenant accélérer un peu le mouvement. Ce n'est pas un cours d'aérobic, enfin ! Voyons un peu comment vous vous fendez après le temps que j'ai mis à vous apprendre cette technique !"
Aussitôt, les élèves se répartirent deux par deux, les groupes à distances respectables les uns des autres. L'un des deux faisait un petit bond en avant en tendant son épée comme un brochette, tandis que l'autre parait le coup ou esquivait.
Se décidant à agir, Lucie se tourna vers Enzo et se rua en avant. Celui-ci, d'un léger mouvement du poignet, dévia son assaut.
La jeune fille recula et recommença. Elle échoua.... Une fois de plus.
Alors elle observa plus attentivement les autres. Avant d'attaquer, ils laissaient planer un petit moment d'incertitude, un petit moment de doute. Puis ils lançaient l'assaut en profitant de la surprise. La plupart du temps, leur attaque était déviée in extremis. Mais une fois sur cinq, le coup faisait mouche.
Lucie se concentra soigneusement. Visa une petite tache de soupe sur la tunique d'Enzo. Se tendit. Bondit.
Le crissement de la lame contre la lame la fit frémir.
Réfléchissant encore plus activement, Lucie comprit. Elle fit le vide dans son esprit. Plus rien d'autre n'existait qu'Enzo, elle et leurs épées dégainées, leurs tranchants à nu.
La tension monta comme une vague dans tous son corps. Se retenant au maximum, la jeune fille contracta ses muscles. La vague déferla. Entre le moment ou elle détendit ses muscles et le moment ou elle arriva sur le garçon, il lui sembla qu'un millénaire s'écoulait.
Bondissant à seulement quelques centimètres du sol, elle tendit le bras et l'épée comme si sa vie en dépendait – d'ailleurs, elle risquait un jour d'en dépendre.
Sa lame parcourut le chemin jusqu'à, en évitant la parade de celle d'Enzo, se pointer sur le nez du garçon, qui loucha dessus.
"Joli coup, pour un premier entraînement", lâcha-t-il.
Lucie rayonnait. Enzo lui tapa sur l'épaule, dans un geste qu'il voulait amical, mais qui fit pousser un petit gémissement de douleur à Lucie.
Elle avait porté son premier coup d'épée : à présent, elle était une véritable apprenti Assassin.


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MessageSujet: Re: La Guilde des Assassins   La Guilde des Assassins I_icon_minitimeMar 2 Aoû - 18:47:59

Après des jours d'efforts, ce chapitre dont j'ai l'impression qu'il est le plus long, étant donné qu'il y a tout un passage qu'il n'y avait pas dans mon carnet originellement.
Alors, sachez que vanko est basé sur quelqu'un de réel. Est-ce qu'il est cohérent ?
Et j'adore particulièrement le nom de l'auberge. What a Face

CHAPITRE 6 : ARC ET FLÈCHES


Lucie se réveilla à l'aube, comme tous les matins. Cette habitude, qu'elle avait prise sur Terre, de se donner une heure de réveil précise, lui permettait de se lever suffisamment tôt pour se préparer à l'aise, sans ressembler à un zombie.
Enfin, pas trop. Dans un demi-sommeil, elle enfila ses vêtements, attrapa ses cheveux qu'elle noua avec un lacet de cuir et souffla un bon coup. Un nouvelle journée l'attendait.
Elle descendit les escaliers, tourna à droite et se retrouva dans la cour du château de Sennal. La cour serait sans doute déserte car personne n'était suffisamment insensé pour se lever à pareille heure...
Quand elle passa la porte de la bâtisse, elle s'arrêta net, ferma les paupières et les rouvrit. La cour grouillait déjà d'une activité matinale, sur un fond sonore de plusieurs dizaines de chants d'oiseaux. Elle se sentit un peu gênée d'avoir dormi aussi tard, et fit la grimace. Mais personne ne lui prêta attention. Elle déglutit et s'avança vers Enzo, qui lui sourit.
"Tu n'as encore rien vu. D'habitude, les oiseaux sont encore plus nombreux. On ne peut même plus s'entendre en parlant normalement."
Lucie nota qu'il avait agréablement fait semblant de prendre son trouble pour la surprise des oiseaux.
"Euh... Salut, Enzo, dit-elle platement.
- Salut. Aujourd'hui, Zoltan m'a fait réveiller en grande pompe, m'a ordonné de le suivre dans son bureau. Là, il m'a assis de force sur une chaise... Et je me demandais quelle nouvelle forme de torture il avait l'intention de tester sur moi, quand il m'a simplement annoncé que je devais t'enseigner à tirer à l'arc, bien que ce soit encore Eomen qui nous supervise."
Il lui en tendit alors un doté d'une double incurvation. Il lui expliqua que cette forme particulière donnait plus de puissance au tir, puis lui tendit un poignée de flèches en bois. Il posa ensuite ses mains sur les épaules de la fille et la fit tourner face aux cibles en lui souriant, les yeux brillants.
Celles-ci, à une vingtaine de pas, semblaient narguer Lucie, la défiant de leur planter une flèche dedans.
Malgré son épaule qui implorait pitié, la jeune fille tendit l'arc au maximum de ses forces. Le poignet au niveau de la joue, un œil fermé pour mieux viser, elle vérifia que son index et la pointe de la flèche étaient dans le même axe, orienté vers la cible. Elle relâcha doucement la corde. Celle-ci claqua, la flèche partit en sifflant et alla se planter presqu'au centre de la cible.
"Pas mal", sourit Eomen qui était pourtant avare de compliments.
Ce genre d'appréciation équivalait, pour un professeur normale, à une exclamation de joie et une embrassade. Mais ce n'était pas vraiment son style.
Lucie recula d'une dizaine de pas, visa de nouveau la cible et fit mouche. Elle tira toutes ses flèches, mais la dernière alla ricocher contre le mur. L'apprentie grommela un instant, puis alla récupérer les traits en se baissant lorsqu'une flèche tirée maladroitement par quelqu'un d'autre la frôla. Il lui adressa un sourire gêné et se concentra.
La jeune fille réessaya autant de fois qu'elle le put, presque toute la matinée en fait, mais à chaque fois, au moins une flèche sur les cinq manquait sa cible.
"Mais enfin ! S'énerva Eomen. Pourquoi n'arrives tu pas à toutes les planter ?
- Mais... tenta de se justifier Lucie. J'arrive à en planter au moins quatre dedans à chaque fois !
- Ce n'est pas le problème ! Pourquoi la cinquième ne suit-elle pas une trajectoire identique à celles des quatre précédentes ? Il te suffit de reproduire les mêmes gestes ! Si tu n'arrives pas à toutes les planter correctement, je peux t'assurer que tu auras un expérience de vie très réduite ! Réduite de quatre cinquièmes, précisément !"
Lucie serra les dents, puis alla ramasser ses flèches.
Elle les encocha toutes les cinq à la fois, puis visa la cible. Elle lâcha la corde qui lui frappa douloureusement le poignet. Mais elle n'en avait cure. Elle contemplait les cinq traits plantés dans cibles, en droite ligne, puis reporta son regard sur Eomen, éberlué.
"Ça vous va comme ça ?"

*

"Voyons ce que tu vaux... dit Enzo.
- Dans quoi ? L’interrompit Lucie.
- ... Si je te défie dans un concours de vitesse, acheva le garçon.
- Prépare ton mouchoir, répondit-elle du tac au tac.
- On verra qui pleurera."
Ils sortirent leurs flèches au même moment. Leurs mains volaient, presque invisibles grâce à la vitesse. Mais Enzo, rôdé par des moins d'entraînement intensif, visait deux fois plus vite que Lucie, qui mettait un certain temps à ajuster ses flèches. Aussi avait-il déjà planté presque toutes les siennes alors que la jeune fille venait d'encocher sa deuxième.
En repensant à la séance d'entraînement du matin même, Lucie décida qu'elle n'avait rien à perdre. Elle saisit tous les traits qui lui restaient, les cala solidement sur son arc, tendit la corde et les envoya se ficher dans la cible. Lucie lança alors un petit regard de défi à Enzo.
"Alors ? Qui va aller pleurer dans les jupons de sa mère, maintenant ?
- Mouais. Mais tu as eu de la chance. Et puis j'aurais pu le faire aussi, et j'aurais gagné."
Lucie savait que ce n'était pas vrai, mais se garda bien de le dire : il devait être suffisamment difficile pour Enzo de se faire battre par une fille, et en plus cela faisait moins longtemps que lui qu'elle s'entraînait.
Prenant pour prétexte d'examiner son bras bleui par les chocs de la corde, elle détourna le regard en grimaçant. Le lendemain, elle aurait l'air d'être tombée dans de la peinture fraîche.
Enzo la nargua en agitant son bras protégé par un épais brassard de cuir. Lucie ne releva pas, lui tira la langue et se saisit d'une protection qu'elle glissa sur bras. Elle l'ajusta en tirant sur les lacets avec ses dents, puis ressaisit derechef son arme.
"Que dirais-tu d'un autre concours, mais en circonstances réelles cette fois ?
- D'accord, mais qu'est-ce que tu veux dire par "circonstances réelles" ?
- T'occupe. Prends des flèches, je vais demander à Eomen sa permission."
Celui-ci surveillait les autres, qui plantaient la plupart de leurs flèches sur les murs, au plafond ou dans le sol. L'un d'eux avait même réussi à toucher son prore pied, et il sautillait en criant. Forcément, ça ne faisait pas du bien.
Après avoir obtenu la permission du maître d'armes, Lucie et Enzo traversèrent le hall d'entrée, le hall et le village entourant le château.
C'était d'ailleurs la première fois que Lucie voyait celui-ci, et elle n'en était que plus étonnée. Les gens, vivant leurs petites vies miséreuses, lui firent comprendre la chance qu'elle avait d'habiter au château ; si elle n'avait pas suivi l'entraînement d'Assassin, elle se serait échinée dans les champs, dans une échoppe ou dans un autre travail peu reluisant.
En amont de la rivière, l'auberge avait déjà ouvert ses portes. On la reconnaissait facilement, avec son enseigne montrant une marmite plein d'une liquide verdâtre, et surmontée du nom de l'établissement, "À la Chaude Soupe". Déjà, de nombreuses gens se dirigeaient vers la porte, l'air affamé. Les rares qui sortaient ne semblaient plus tenir debout, sans doute abrutis par le trop de vin qu'ils avaient bu.
Tout au bout du village, en aval de la rivière, l'odeur de putréfaction de la tannerie tenait les autres maisons à l'écart, dessinant une sorte de rayon sans maisons. Entre les deux bâtiments se tenaient différentes échoppes, telles une forge, un cordonnier et plusieurs tailleurs. Entre les commerces et à l'étage, se trouvaient de petites habitations miteuses.
La muraille de pierre grise ceignant Sennal était percée d'une grande porte de bois grande ouverte, gardée par quelques Assassins vigilants.
Après que les gardes les eurent respectueusement salué, Enzo et Lucie continuèrent leur chemin, et se trouvèrent bientôt dans un paysage complètement différent.
À droite s'étendait une plaine à perte de vue, bien que la ligne d'horizon soit brisée par plusieurs bosquets, tandis que la gauche et le terrain leur faisant face étaient obscurcis par une immense forêt de conifères et de chênes. Le chemin de pierre et de terre qu'ils avaient suivi semblait conduire à cette dernière forêt, puis obliquait vers l'ouest, c'est-à-dire la plaine.
Enzo pointa un doigt en direction du sud-ouest.
"Par là, c'est Bélakel, la capitale. Et nous, on va... par là !"
Il désignait un grand arbre solitaire à quelques centaines de mètres.
Arrivés à une distance trop grande au goût de Lucie, ils s'arrêtèrent. Montrant le foulard rouge attaché au tronc de l'arbre, Enzo expliqua que c'était leur nouvelle cible. Et, montrant l'exemple, il décocha une flèche qui se ficha au centre de la petite tache pourpre.
Les cheveux ébouriffés par une rafale de vent, Lucie secoua la tête pour se dégager la vue, puis cala une flèche sur sa corde. Le sifflement du bois se perdit dans le son du vent, alors que la flèche allait se planter une dizaine de mètres sur la gauche.
En un éclair, Lucie comprit : le vent avait fa&it dévier le trait dans sa course....
"Je vois que tu as besoin de quelques leçon, s'amusa Enzo. J'ai peut-être omis de t'avertir que le vent risquait de te gêner."
Lucie lui tira la langue, puis s'approcha.
"Montre-moi, demanda-t-elle.
- Premièrement, il faut que tu calcules la vitesse et la direction du vent. Pour ça, il suffit de cueillir..."
Il se pencha, saisit un brin d'herbe et se lança dans des explications compliquées. Si compliquée que Lucie s'y perdit un peu, mais fit semblant d'écouter attentivement. Finalement, pour démontrer tout cela par la pratique, Enzo lâcha la petite bande verte, qui voleta quelques instants, puis alla se déposer tout doucement sur le sol, quelques mètres à gauche. Après une demi-heure d'explications, Lucie avait plus ou moins compris comment calculer l'inclinaison qu'elle devait ajouter pour que sa flèche touche la cible.
Après avoir réussi à en planter plusieurs, elle se tourna vers le garçon :
"Et comment je fais, si j'ai des Gardiens après moi ? J'aurai sans doute pas toujours trois ans pour calculer mon angle !
- Pour ça, il faudra tirer au jugé !" dit Enzo en s'éloignant en direction de Sennal, laissant une Lucie pour le moins perplexe.

*

Après un bon dîner, Lucie se sentait un peu mieux et aurait tout donné pour pouvoir se reposer. Mais Enzo, implacable, l'entraîna dans la plaine. Cette fois, accompagnés de Vanko, ils devaient lui apprendre à fabriquer un arc à flèches.
Enzo lui avait expliqué qu'il ne fallait pas être impressionné par lui, qu'il était un peu extravagant mais rien de plus. C'était lui qui fabriquait les arcs, les arbalètes et ce genre d'objets pour les Assassins, mais il souhaitait que ceux-ci aient quand même quelques notions de fabrication. Il jouait également de divers instruments, mais Lucie n'avait pas encore eut l'occasion de l'écouter jouer.
"Mais attention, l'avait-il mise en garde, n'écorche pas son prénom, il déteste ça."
Grand, les cheveux courts, les yeux bruns et rieurs, Vanko avait tout pour attirer la sympathie. Mais par dessus-tout, il adorait raconter les blagues les plus idiotes possible. Il semblait en permanence survolté et en pleine forme.
Traversant la plaine en direction d'un bosquet, armés d'une scie, d'un canif chacun et de quelques plumes, et d'une longue ficelle bien solide.
"Le plus important, dit Vanko, c'est de bien choisir son arbre. L'idéal étant l'if, le noisetier ou le frêne. Le noisetier est plus souple, mais celui que nous allons prendre aujourd'hui, c'est le bois d'if. On va essayer de s'en procurer quelques branches. Je vous rappelle que cet arbre à des feuilles vert foncé et des petites baies rouges, que je vous déconseille de manger, à moins bien sûr que vous vouliez absolument mourir dans d'atroces souffrances."
Il paraissait toujours jovial en disant cela sur le ton de la conversation. Dans son dos, Lucie grimaça à l'adresse d'Enzo, qui haussa les épaules, l'air de dire que c'était normal.
Enfin, ils arrivèrent devant le bosquet vers lequel ils marchaient depuis qu'ils étaient partis de Sennal. Aussitôt, Vanko posa une main sur le tronc d'un arbre correspondant à sa description, et commença à grimper.
"Alors ? Cria-t-il, voyant qu'ils ne le suivaient pas. Qu'est-ce que vous attendez, les mous ? On dirait des... Vous êtes bien trop... sages !
- C'est un peu le but, non ? Chuchota Lucie en commençant à s'élever.
- Ouais. Mais pour lui, c'est l'insulte suprême. Il considère qu'on devrait être un peu plus excités à l'idée de monter dans un arbre. D'ailleurs, il risque de nous faire un petit discours quand on sera en haut."
- En effet, lorsqu'ils parvinrent à la cime de l'arbre, Vanko les attendait, assis à califourchon sur une fourche. Il se retourna vers eux, les yeux brillants.
"C'est magnifique, n'est-ce pas ?"
Magnifique. Le mot était faible. La plaine s'étendait devant eux, offerte à leurs regards émerveillés devant ses reflets légèrement turquoise. L'herbe haute se balançant doucement sous l'éclat du soleil de l'après midi. Tout au bout, la mer, comme une promesse lointaine d'aventure et d'incertitude. Se confondant avec l'horizon, lui-même seulement brisé par les murailles de Sennal, hauts murs de pierre grise s'intégrant au paysage.
Derrière eux, une immense forêt, recouvrant vallons et collines, son vert éclatant camouflé par quelques rares chapes de brume.
Lucie ne dit rien, se contentant de savourer la beauté des lieux en silence.
"Tu parlais d'un discours, non ? Dit Vanko, rieur, brisant la quiétude des lieux, tandis qu'Enzo paraissait soudain très intéressé par ses pieds. Eh bien... Je pense... Je pense que nous avons une chance incroyable d'être ici. Que tout être humain ayant cette chance ne devrait pas la gâcher en essayant de la décrire avec cette arme imparfaite... La parole."
Et, sur ces mots, il brisa la branche qu'il fixait depuis quelques instants. Lucie et Ezo s'entreregardèrent, choisirent de rien dire eux aussi et cassèrent une branche de la même façon.
Puis tout ce petit monde descendit, s'aidant d'une seule main, l'autre occupée par la branche, si encombrante que Lucie glissa. Elle poussa un petit cri étouffé, mais son morceau de bois se coinça sur une fourche, et elle ne tomba pas. Elle agrippa de nouvelles prises et se remit à descendre, plus prudente que jamais.
Une fois en bas, Vanko leur montra comment tailler leur récolte, tout en leur expliquant ce qu'ils allaient réaliser, et comme ils allaient le faire.
"Donc on va fabriquer un arc long avec une incurvation simple. Avec une incurvation double, la flèche irait plus loin mais c'est plus difficile à fabriquer."
Une fois leurs branches correctement équarries, les deux jeunes gens, sur les conseils de leur professeur, nouèrent chaque extrémité de leur corde en une petite boucle, après avoir soigneusement calculé la longueur nécessaire. Ils passèrent une boucle au bout du bout de bois, plièrent celui-ci autant que possible et accrochèrent l'autre boucle à sa deuxième extrémité.
Il fabriquèrent ensuite des flèches, l'important étant de bien équilibrer la pointe de métal et l'empennage fait de plumes. Plus la flèche était longue, et plus elle était empennée, plus elle irait loin.
Alors qu'Enzo se risquait à des longueurs pharaoniques, Lucie se cantonna à des tailles plus traditionnelles, utilisant des plumes de mésanges (ou, du moins, ce qui y ressemblait) et de corneilles. Lorsqu'enfin la jeune fille se décida à tester son œuvre, le soleil était déjà bas dans le ciel.
La flèche vola loin, et alla se planter avec un son mat dans le foulard écarlate, toujours accroché au tronc de l'arbre qui avait servi de cible d'entraînement au matin.


Dernière édition par Reflets de Lune le Mer 3 Aoû - 12:33:56, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: La Guilde des Assassins   La Guilde des Assassins I_icon_minitimeMer 3 Aoû - 12:24:11

CHAPITRE 7 : OBJETS VOLANTS NON IDENTIFIÉS


Les semaines passèrent. Lorsque Lucie parvint à planter, par un temps d'orage bien entendu, toutes ses flèches dans une cible située à une centaine de mètre et à fabriquer un arc et une dizaines de flèches en moins d'une heure, Zoltan s'estima satisfait.
Un jour qu'elle avait demandé à Enzo, un peu gênée, pourquoi il ne suffisait pas de demander aux Assassins d'aller secourir ses parents, Vanko, qui passait par là, avait répondu à sa place :
"Mais parce que personne à part toi n'est assez fou pour y aller !"
C'était sur cette réplique réjouissante qu'il avait tourné les talons.

*

Lucie contemplait son déjeuner sans rien dire. Elle n'avait pas vraiment faim, peut-être à cause de ce nœud mélancolique qui lui serait l'estomac.
"Qu'est-ce qui ne va pas ? Demanda Enzo, qui avait déjà reprit trois fois du pâté et lorgnait sur le dernier morceau.
- Rien. Ce... Ce n'est pas important."
Enzo mima le psychologue sortant son carnet, son stylo et croisant les jambes, puis se tourna vers elle.
"Je vous écoute. Racontez-moi votre vie et vos problèmes pendant que je fais semblant de comprendre quelque chose.
- Oh, si tu y tiens. Aujourd'hui, c'est mon anniversaire.
- Joyeux anniversaire, alors, dit le garçon en perdant son ton professionnel.
- J'ai dix-huit ans aujourd'hui. L'âge de la raison.
- Chez nous c'est à sept ans.
- Ah.
- Donc ? Qu'est-ce qui ne va pas ?
- Eh bien... Ça fait à peu près dix-sept ans qu'ils sont là-bas, alors."
Enzo comprit directement ce qu'elle sous-entendait par le là-bas. Il rapprocha sa chaise et lui posa une main sur l'épaule, dans un geste se voulant consolant.
"Je ne vais pas me vanter en disant que je comprends ce que tu ressens, dit Enzo après une minute de silence. Je n'ai jamais connu mes parents, donc je ne peux pas... comprendre. Le fait qu'ils soient si loin, mais si proches... Bref. Ici, tu ne perds pas ton temps. Parce que je sais que c'est ça qui t'inquiète. Le délai d'attente. Mais si tu y vas avant la fin de ta formation, tu mourras.
- Ce qui serait tout de même un peu fâcheux, répondit-elle en prenant un accent snob sur le dernier mot.
- J'en conclus donc que tu as un total intérêt à rester ici pour me massacrer au rythme agréable et reposant de deux leçons par jour.
- Tu exagères, voyons ! C'est toi qui m'as appris comment calculer la vitesse du vent.... Parce que sans toi, ça aurait été très bien que j'atteigne une cible immobile dans une salle. Mais je doute que nos ennemis arrêtent de bouger juste pour me faire plaisir.
- Là, tu n'as pas tort. Attends une minute, je reviens tout de suite."
Sur ces mots, il disparut en courant en direction de la porte de la salle à manger. Il reparut une soixantaine de secondes plus tard, brandissant une sorte de petite boite de bois brun verni.
"Très ponctuel, à ce que je vois, ironisa Lucie.
- Tais-toi et admire ! Dit-il en lui tendant ce qu'il portait.
- C'est une... boîte.
- Non vraiment ? Je n'en m'en étais pas aperçu, ironisa le garçon. Ouvre !"
Lucie ouvrit délicatement la boîte. De la taille de son poing fermé environ, elle était étonnamment lourde. L'intérieur, recouvert d'un tissu pourpre qui ressemblait à du satin, luisait faiblement dans la lumière du matin. L'objet qu'elle contenait failli faire laisser échapper un soupir à Lucie, qui se retint à temps. Encore et toujours ce symbole. Sans doute était-il censé être représentatif de quelque chose, mais elle n'en avait que marre.
Mais cette fois, il était dans une sorte de métal noir recouvert de volutes argentées. Un cercle dont les rayons définissaient les sommets d'un triangle.
"Tu sais ce que ça signifie, au moins ? Demanda brusquement Enzo.
- Euh... Non.
- Le cercle signifie le peuple, tournant sans cesse dans leur ronde immuable et tranquille. Le triangle nous symbolise, nous, les Assassins. Nous avons beau avoir des points communs avec les gens, nous ne nous mêlons pas à eux. Nous sommes... différents. Les trois rayons nous relient à notre but. Et... par les tenants et aboutissants de ce but, nous sommes reliés au peuple."
Lucie sourit. Elle passa le collier de soie à son cou, puis serra Enzo dans ses bras, incapable de parler. Lorsque les tables se furent vidées de leur occupants, ils sortirent dans la cour sous une bruine matinale.

*

"Aujourd'hui, je vous demanderai d'être particulièrement attentifs, commença Eomen, 'air grave. En effet, nous allons commencer à travailler avec ceci – il tira un long poignard à la lame effilée de sa poche – et je doute qu'on puisse recoller un morceau de votre... anatomie qui aurait été tranché par un malencontreux hasard. Et avec ceci – il prit cette fois un boomerang sur la table derrière lui – je vous conseille de bien viser."
Il fit une démonstration. Reculant le pied droit, il amena son bras derrière son épaule, et projeta le couteau de lancer en avant, son bras ressemblant à un serpent en pleine attaque. La lame siffla, tourna sur elle-même et alla se planter avec un bruit sec dans la cible à l'autre bout de la salle. Il fit le même genre de démonstration avec une étoile de jais, puis envoya le boomerang décapiter un mannequin de paille. Après cela, il dégaina son épée et l'envoya se planter dans la porte. Après avoir envoyé tout ce qui était lançable, et même ce qui ne l'était pas, il se calma et se tourna vers ses cinq élèves un peu sceptiques. Leur nombre avait été réduit car celui qui s'était planté une flèche dans le pied avait du rester à l'infirmerie. Il restait donc Anontès, le garçon ronchon que Lucie avait déjà repéré, celui aux longs cheveux et à l'air avenant dont elle savait qu'il s'appelait Olem, un autre dont elle ne connaissait pas le nom mais qui paraissait très proche d'Anontès, et, bien sûr, Enzo et elle.
"Bien, reprit Eomen. Si vous êtes droitier, vous devez reculer le pied droit. En fait, vos pieds doivent presque être parallèles à la cible, mais votre buste doit être tourné vers elle. Dans l'idéal, il vaut mieux tenir l'objet à lancer par la lame, quel qu'il soit. Reculez votre bras par dessus votre épaule, et imprimez un sens de rotation à cet objet. Ensuite, relâchez tout et propulsez votre bras en avant. Sans oublier de viser, bien sûr.
- C'est possible de faire tout ça en même temps ? Chuchota Lucie à Enzo.
- Et les bavardages sont inutiles, assura Eomen.
- Apparemment", répondit le garçon avant de se tourner vers une cible, l'air décidé.
Lucie se tut alors et se plaça elle aussi face à un disque de bois tendre, les poches pleines. Elle lança soigneusement sa première arme en suivant les conseils de leur professeur, qui corrigeait leurs positions, leur donnait d'autres explications et une avalanche d'instructions diverses. Le couteau n'arriva même pas jusqu'à la cible. Il tomba en pleine course, sans plus d'élan. S'entêtant, la jeune fille liquida son stock en quelques minutes.
Ce fut seulement au bout d'une heure, après avoir essayé différentes techniques, reculés et avancé, changé son emplacement de prise et son angle de pliage de bras, que Lucie parvint à planter son premier poignard, le manche vers le bas.
"Tu devrais reculer d'un ou deux pieds, lui dit Eomen. La lame se plantera mieux. Mais ne recule pas trop non plus, sinon le manche sera trop haut par rapport au point de plantage."

*

L'après-midi fut consacré au lancer du boomerang. Les élèves étaient censé d'abord simplement réussir à faire revenir leur arme vers eux, et surtout à la rattraper. Du moment que l'objet était plus au moins correctement lancé, il revenait sans trop de mal, et Lucie ne devait que rès peu se déplacer pour le rattraper.
Le cinquième garçon, l'ami d'Anontès, réussi à s’assommer avec son propre boomerang. L'ayant perdu de vue, il le cherchait du regard, et il le reçut en plein dans l'arrière du crâne. Lucie éclata d'un rire peu charitable mais se ravisa aussitôt, rougissante.
Au bout d'une semaine d'entraînement intensif, chaque élève était capable d'envoyer n'importe quoi dans une cible fixe. À leur grande horreur, Eomen annonça alors qu'ils allaient s'entraîner sur des cibles mouvantes. Enfin, ce serait plutôt à eux de se déplacer parce que personne ne se portait volontaire pour être cobaye, ce qui était compréhensible.
Lucie fut la première à maîtriser cette "matière", s'attirant les regards jaloux des autres. Sans doute parce que, sur Terre, elle avait eu l'habitude de courir.
La jeune fille poursuivit sa courbe vers le succès, maîtrisant de plus en plus vite les techniques étranges de leur professeur. Celui-ci leur donna enfin l'autorisation de lancer tout ce qu leur tombait sous la main. Aussi, Anontès reçut un jour une assiette dûment nettoyée dans la figure, pendant qu'Enzo se tordait de rire, et que Lucie avait l'air particulièrement satisfait.

*

Lorsqu'ils parvient enfin à toucher une quinzaine de fois de suite toutes les cibles, dans toutes positions, dans toutes les situations, avec tout et n'importe quoi (Lucie du même essayer avec un sandwich au thon), Eomen s'estima satisfait. Comme ses pauvres élèves ne sentaient plus leurs doigts après des semaines d'entraînement, il décida de les autoriser à faire une pause... Et de leur apprendre donc à monter à cheval.

Il était tard, et Lucie bâilla. Enzo était à l'infirmerie, le bras légèrement entaillé par un accident de parcours. La jeune fille soupira, puis, comme il n'était pas tard, décida d'aller voir les chevaux avant d'aller se coucher, pour faire connaissance avec ses futurs tortionnaires.
Elle avait toujours aimé ces grands animaux paisibles et pourtant capable de bien plus. Ceux de Sennal étaient grands, fins et rapides, ou lourds et solides. Mais ellke avait du mal à s'imaginer sur leur dos.
Lucie descendit les quelques marches menant dans la cour, puis obliqua à droite, en direction des écuries. La douce chaleur des animaux, l'odeur du foin séché, le bruit de mastication, tout cela était très apaisant. La jeune fille tira un tabouret, et s'assit face à un hongre bai à l'air gentil. Lui caressant doucement le chanfrein, ne pensant à rien, elle se sentait très calme.
Aussi sursauta-t-elle violemment quand un bruit de pas retentit derrière elle. Elle se retourna brusquement. C'était Anontès. Il la regardait avec un air de haine non dissimulée. Sans doute avait-il été froissé par l'assiette. Et même plus, vu la façon dont il se frottait les poings.
Lucie grimaça. En combat à mains nues, elle n'avait aucune chance. Elle était plus petite qu'Anontès, et surtout, n'avait jamais rien frappé. Sauf sur une porte, pour entrer.
"Comment fais-tu ? Demanda hargneusement le garçon.
- Faire quoi ? Demanda Lucie, qui s'attendait à tout sauf à ça.
- Je suis sûr que tu triches !
- Ah ! Ça ! Dit Lucie, comprenant enfin. Et bien, je ne sais pas, je suppose que c'est l'entraînement. On ne peut pas vraiment tricher sur ce genre de choses, non ?
- Avant ton arrivée, j'étais le meilleur, dit-il. Maintenant...
- Tu as décidé de regagner cette place, c'est ça ?" Répondit la jeune fille, sur ses gardes et prête à bondir pour éviter l'assaut qui n'allait pas tarder.
Dans l'ensemble, Lucie ne se débrouilla pas trop mal. Quand elle réussit enfin à courir en dehors des écuries et à se réfugier dans sa chambre, elle n'avait qu'une bosse, deux ecchymoses et la lèvre fendue. Elle s'assit sur son lit, se demandant si Anontès lui en voudrait vraiment pour ce petit croche-pied qu'elle lui avait fait juste avant de partir. Vu le bruit qu'avait fait son nez en percutant le sol, sûrement.
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MessageSujet: Re: La Guilde des Assassins   La Guilde des Assassins I_icon_minitimeVen 12 Aoû - 16:19:36

CHAPITRE 8 : AU GALOP SUR LA PLAINE


"Qu'est-ce qui t'es arrivé ? Interrogea Enzo en regardant Lucie d'un air suspect.
- Moi, rien, répondit-elle d'emblée, sans même prendre le temps de réfléchir.
- Essaye pas de m'embrouiller. Tu t'es vue ?
- Non, répondit-elle le plus franchement du monde.
- Alors, regarde."
Le garçon lui tendit un miroir. Effectivement, un énorme coquard lui ornait désormais l’œil droit, ainsi qu'une bosse de la taille d'un œuf de pigeon sur le front. La jeune fille fit la grimace, puis regarda ailleurs en sifflotant.
"Qui t'as fait ça ? Demanda le garçon, furieux.
- Personne, personne, chantonna Lucie.
- Viens pas me dire que tu t'es fait ça toute seule. Je sais que t'es vraiment maladroite quand tu veux, mais la pour le vouloir faut être un peu, ou même complètement fou.
- Je te dit que c'est rien, d'accord ?" S'énerva Lucie.
Elle voulait régler ce problème seule.

*

Après le déjeuner, leur nouveau professeur du jour, un certain Worriack, les aligna dans la cours et leur expliqua quelques principes de base.
Lucie avait toujours voulu monter à cheval, mais n'avait jamais pu car sa mère... Enfin, celle qu'elle pendait être sa mère l'en avait toujours empêchée.
Worriack, donc. Il avait le crâne chauve, les yeux ronds comme des billes et une petite moustache. L'exemple parfait du psychopathe en vadrouille. Il portait une sorte de chemise sale, un pantalon long, des chaps et agitait continuellement les doigts. Tout cela contribuait à le rendre un peu... étrange.
Tout en écoutant le discours de leur professeur, Lucie remarqua non sans une certaine satisfaction que le nez d'Anontès avait une forme étrange. Il la fusilla du regard, et elle lui adressa un sourire sarcastique.
Après toutes les explications qu'il leur avait données en marchant de long en large, Worriack les invita à entrer dans les écuries et leur expliqua comment équiper leur cheval. Lorsque Lucie eut récupérer le matériel de la monture qui lui avait été attribuée, elle se rendit devant son box et grimaça.
Selon la plaque sur la porte de la stalle, il s'appelait Lazare. C'était un très grand hongre gris, le regard nerveux, les oreilles largement écartées et bien trop en arrière au goût de la jeune fille. Il avait une petite tache blanche sur le front, et quatre balzanes haut chaussées.
En se débattant avec les différentes lanières de la bride, du collier de chasse et de la selle, Lucie ne put s'empêcher de se remémorer cette petite comptine idiote.
Balzane une, cheval de fortune
Balzanes deux, cheval de gueux
Balzanes trois, cheval de roi
Balzanes quatre, cheval à abattre
Balzane imaginaire, cheval de guerre

Elle tenta de se convaincre que ce n'étaient que des comptines idiotes, sans aucun rapport avec la réalité, mais elle n'y parvint pas. Le doute s'était insinué comme un animal pervers, et refusait de se laisser déloger.
Alors qu'elle serrait la sangle, le cheval sembla prendre une grande inspiration avant de se figer, mais Lucie n'y prit pas garde. Ensuite elle se recula de quelques pas et admira ce qui pouvait passer pour son œuvre. C'était surtout la tête de Lazare qui l'inquiétait. Elle ne devait pas avoir exactement tout bien placé, puisque le mors passait entre les oreilles de l'équidé.
Lucie haussa les épaule, puis attrapa le cheval par le licol. Elle le mena dehors et constata qu'elle était la dernière, et, de surcroît, la seule à n'avoir pas su correctement préparer son cheval.
Les autres l'attendaient de pied en cap, à droite de leur cheval, tandis que Worriack les inspectait. Lorsqu'il se tourna vers Lucie, un tremblement irrépressible agita sa moustache, puis il se laissa franchement aller et éclata de rire. Il s'approcha de son cheval, remit la bride dans le sens prévu et lui fit la courte échelle pour qu'elle puisse monter.
Lucie glissa les pieds dans les étriers et saisit les rênes, nerveuse. Les autres firent de même. Une fois que tout le monde fut en selle, et qu'ils eurent acquis la maîtrise des commandes de base, Worriack les fit traverser le village et ils se retrouvèrent dans la plaine.
Lucie n'osa faire remarquer que cette sortie lui semblait un peu prématurée. Vu les mouvement anarchiques de Lazare, celui-ci bouillait d'envie de partir au galop. La jeune fille le retint du mieux qu'elle put ; elle n'avait pas encore les capacités requises pour rester en selle à une pareille allure.
Worriack leur fit décrire toutes sortes de formes étranges et sans aucune utilité autre que de les traumatiser à vie. Il les fit démarrer au trot et Lucie sentit Lazare qui semblait emmagasiner l'énergie non-dépensée pour pouvoir partir encore plus vite par après. Cet après vint bien trop tôt au goût de la cavalière, qui essaya de le ralentir. Elle ne désirait pas vraiment mourir jeune. Lazare finit par se dégager de la fille, et partit perpendiculairement à leur direction première... au grand galop. Lucie sentit alors, avec horreur, son pied droit descendre, pendant que le gauche montait graduellement. Elle essaya de rétablir l’équilibre, mais Lazare esquissa une sorte de demi-saut, entre la foulée et le bond. Lucie vida les étriers, reçut un bon coup de sabot en pleine tête en prime et atterrit dans une flaque de boue.
Lucie cligna des yeux et se releva sur un coude. Du poignet, elle essuya la boue qui lui maculait le visage. Elle en cracha un peu, puis s'assit. Trop vite, puisque tout tourna soudain. Elle ferma les yeux, les rouvrit, puis se releva, mine de rien, et alla récupérer Lazare qui s'était arrêté et broutait paisiblement, comme si il ne s'était rien passé.
Elle le considéra avec méfiance, puis haussa les épaules. Elle devait réussir à tenir au galop plus de deux secondes et demie. Elle serra les talons, et Lazare prit calmement le pas.

*

Lorsque Worriack leur expliqua comment prendre le galop, Lucie ne put retenir une grimace d'appréhension, mais elle ne dit rien.
Elle essaya d'appliquer toutes les instructions de leur professeur, mais échoua lamentablement. Toutefois, comme les autres chevaux étaient déjà loin devant, Lazare se décida à les suivre, passa du pas au trot puis au galop, et rattrapa enfin Enzo, qui les précédait.
Lucie, pendant ce temps, serrait une touffe de crinière entre ses mains moites et essayait de ne pas tomber. Elle avait déjà eut son compte.
"On va sauter ce tronc !" lança Worriack.
La jeune fille l'insulta intérieurement en termes lui reprochant son manque de responsabilités, sa santé mentale, ce qu'il buvait ainsi que le métier de sa mère.
Mais elle s’accrocha vaillamment, et resta en selle, se décollant à peine du siège pendant le saut. Lazare se posa impeccablement, et Lucie se retrouva projetée contre son encolure. Elle entoura celle-ci de ses bras pour ne pas tomber, puis se redressa, l'air de rien.
Le succès des autres fut plus discutable, notamment Anontès qui resta dans la bonne position, même après que son cheval soit partit sans lui. A jeune fille éclata d'un rire peu charitable, tout en sachant que c'était une erreur qu'elle payerait chèrement.
Ils rentrèrent au château, les fesses et l'honneur meurtris.

*

Le soir même, Lucie se fit aborder par Anontès et deux de ses amis. Apparemment, il ne voulait plus prendre de risques. La mauvaise décision que le garçon prit fut de tracer un grand A majuscule sur la tunique de la jeune fille.
Enzo l'aborda, étonné de sa tenue un peu étrange, et tout son visage se contracta, comme si il allait exploser mais s'efforçait de retenir tout ce qu'il aurait pu lâcher. Il s'éloigna à grands pas sans même lui demander des explications, et Lucie ne le revit plus de la soirée.
*
Le lendemain, le réveil fut un véritable torture. En dehors de son deuxième oeil au beurre noir, Lucie se souvenait des courbatures de sa chute de cheval et connaissait désormais les moindres muscles travaillant lors de la pratique de l'équitation.
Elle s'habilla et se traîna lamentablement en bas pour le déjeuner. S'étant assise, elle se saisit d'une pile de tartines et commença à les avaler, avant de se rendre compte qu'Enzo était assis en face d'elle, un grand sourire sur le visage et un bleu s'épanouissant sur l'avant-bras gauche. Lucie l'examina attentivement, mais il n'avait rien d'autre. Elle remarqua pour la première fois qu'il était étonnement musclé, à croire qu'il soulevait de la fonte toutes nuits.
La jeune fille observa discrètement la tablée, et fronça les sourcils en remarquant qu'Anontès n'était pas là.
"Anontès est à l'infirmerie avec un bras cassé et deux dents en moins, l'informa Enzo aimablement en voyant son air perplexe.
- Tu m'en vois... ravie", répondit Lucie.
Ce qui était vrai. Enfin débarrassée de lui, elle aurait sans doute de meilleures chances de parvenir au terme de son apprentissage. Un petit doute l'habitait quand au responsable de cette... défection forcée, mais elle ne dit rien. Elle ne pouvait pas en être sûre, et il n'y avait rien à dire.
"Pour changer de sujet... poursuivit le garçon, tu n'es pas morte ?
- Pas encore, bien que je sache que ça t'aurait fait plaisir, ironisa-t-elle.
- Très drôle. Je crois qu'on doit changer de cheval, aujourd'hui. Tu as une idée de celui que tu choisiras ?
- Pas la moindre, soupira Lucie, désappointée.
- Il te suffira de les regarder dans les yeux. Tu sentiras lequel seras le bon.
- Ça m'aide beaucoup ça. Je peux presque dire que tu m'as mâché le travail, se moqua-t-elle.
- Très drôle.
- Je sais, on me le dis souvent."
Sur ce, ils conclurent cette discussion de la plus haute importance, et retournèrent à leurs assiettes. Ils se traînèrent ensuite jusqu'à l'écurie, où Worriack les attendait de pied ferme.

*

Deux mois plus tard, à raison d'un entraînement intensif tous les jours par tous les temps, Lucie montait d'une façon peu académique mais s'en tirait plutôt bien.
Vint lors le jour où chaque élève du groupe du choisir son cheval, celui qui lui appartiendrait. Les chevaux destinés à cet usage n'étaient pas donnés au cavaliers débutants, ce serait donc la première fois qu'ils les monteraient. Pour sa part, Lucie n'était pas vraiment mécontente de laisser Lazare derrière elle.
Elle se rendit donc pour la première fois dans la deuxième aile des écuries, où étaient alignés les chevaux des Assassins en plus de leurs futures montures.
Le premier, un hongre rouan aux yeux bruns, voulu mordre Lucie lorsqu'elle passa près de lui, mais lécha et bava amicalement sur Olem. Celui-ci partit donc avec pour l'essayer. Enzo se dégotta une petite jument gris pommelé aux grandes oreilles mobiles. Il restait alors trois chevaux : une jument baie, lourde et aux yeux méchants, mais qui parut légère comme une plume lorsqu'elle se cabra ; une jolie yearling aux membres fins et délicats et un solide étalon noir et argent.
Lorsque Lucie passa près de lui sans vraiment le regarder. Elle ne pensait pas vraiment être capable de monter un cheval d'une telle envergure. Mais il souffla doucement, attirant son attention. Il était entièrement noir sombre, à l'exception d'une liste gris argent sur le chanfrein. Ses grands yeux bruns inspirèrent confiance à Lucie, qui entrouvrit la porte de son box et se glissa à l'intérieur.
Worriack, qui incitait les derniers à se dépêcher, lui dit calmement :
"Je te déconseille d'essayer Sylver. Il a déjà flanqué à terre trois de mes meilleurs cavaliers... ainsi que moi."
Mais, comme à son habitude, Lucie n'en fit qu'à sa tête, et sella l'étalon.

*

Balzane imaginaire, cheval de guerre
Lucie se rendit compte que, finalement, cette comptine n'était peut-être pas aussi idiote qu'elle en avait l'air. Sylver était léger mais musclé et cambra fièrement l'encolure lorsqu'elle l'enfourcha.
Ils sortirent de la cour, puis du village et se rendirent près de l'arbre au foulard rouge. La plupart des cavaliers connurent quelques surprises avec leurs montures, mais ce fut Lucie qui eut la plus énorme : Sylver se cabrait, ruait et se démenait pour la faire tomber.
Mais sa cavalière resta bravement en selle, essayent de conserver la fragile assiette qu'elle avait fini par acquérir, au prix de bien des efforts. Elle tendit les rênes, se pencha en arrière et Sylver se calma peu à peu. Soudain, alors que l'attention de la jeune fille s'était un peu relâchée, le cheval bondit en avant et entama une danse folle, qui faisait passer ses acrobaties précédentes pour une promenade de santé. L'étalon bondissait partout, tel un feu follet, la secouant comme un prunier.
Lucie resserra les rênes, serra les jambes et se pencha en arrière. Alors que l'étalon se cabrait, elle renvoya son poids sur son encolure, pour ne pas perdre l'équilibre.
Sylver retomba sur ses quatre pieds, mais se mit à reculer. La jeune fille donna des jambes. Aussitôt, l'étalon s'élança au grand galop. Ne réussissant pas à l'arrêter, la jeune fille, d'un geste ferme, l'obligea à tourner à droite. Incapable d'avancer droit, le cheval décrivit des voltes de plus en plus petites. Enfin, il repassa au trot, au pas, puis il s'arrêta, même pas essoufflé.
"Très gentil", réussit à bredouiller Lucie.
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MessageSujet: Re: La Guilde des Assassins   La Guilde des Assassins I_icon_minitimeJeu 1 Sep - 14:04:01

CHAPITRE 9 : FUITES


Lucie ne s'était toujours pas remise de son soudain succès équin. Aussi fut-elle plutôt surprise quand Enzo lui expliqua, à grand renfort de gestes désordonnées que leur groupe allait maintenant apprendre à manier l'épée.
"Crois-moi, avait-il dit, je suis plus déçu que toi ! Je suis sûr que tu vas encore trouver un moyen de me trancher le bras sans le faire exprès !"
Et sur ces paroles rassurantes, il avait terminé s'était levé et s'était dirigé vers sa chambre, laissant Lucie verdir devant son assiette. Mais elle savait qu'elle serait la plus désavantagée : tous les autres avaient déjà pu bénéficier d'une ou deux leçons. Quant à elle, elle n'en avait jamais eut l'occasion.

*

Ce fut, en un sens, un nouveau professeur qui les accueillit.
"Bien le bonjour !" lança-t-il alors que Lucie venait juste d'entrouvrir la porte.
La jeune fille entra complètement et se retrouva nez à nez avec Zoltan, qui avait arborait un grand sourire. Il voulait sans doute la rassurer, mais il avait plutôt l'air un peu dément.
Il invita le reste du groupe, et leur distribua différentes pièces de cuir destinées à les protéger, mais dont Lucie aurait pu jurer que c'était pour mettre leur résistance à l'épreuve. Il leur donna ensuite des épées ayant visiblement beaucoup servi, au vu des longues estafilades barrant les lames. Il leur servit ensuite son introduction.
"On dira ce que l'on veut, l'escrime est un art, comme l'est la peinture ou la musique. Nous utiliserons des rapières, c'est-à-dire des épées, pour utiliser un terme vulgaire, fines et maniables. On privilégiera la rapidité et l'habilité à la force pure, bien qu'un peu de celle-ci ne fasse jamais de tort. Je vais tenter de vous apprendre la technique la plus efficace, à savoir la taille et l'estoc. La taille étant le fait de balayer l'air avec le tranchant de l'arme, et l'estoc étant le fait d'enfoncer la pointe de sa rapière. Pour être encore plus efficace, on pourra y ajouter quelques prises de mains, c'est toujours utile pour déstabiliser l'adversaire. Vous utiliserez, si vous êtes droitier, dans la main droite votre rapière et dans la gauche vous pourrez prendre ce qu'on appelle justement un main-gauche. Ensuite si les résultats sont concluants, on pourra peut-être envisager l'usage d'une lame inversée, qui permet d'être plus rapidité en raison de sa taille réduite. Mais aucun des plus grands discours ne peut valoir la pratique, on va donc y aller tout de suite. Mettez-vous par deux, et séparez-vous de l'autre groupe. Vous allez vous exercer au coup le plus simple."
Lucie et Enzo s'écartèrent un peu des deux autres, et la jeune fille regarda le garçon d'un air un peu intimidé.
"Qu'est-ce qu'il entend par le coup le plus simple ?
- Tu vas voir. Prépare-toi."
Et il lui adressa un sourire carnassier. Lucie tenta alors de se mettre en garde. Plutôt maladroitement, d'ailleurs. Enzo brandit son épée, et réussi à faufiler la lame entre Lucie et son bras. Il l'effleura de la lame, et lui adressa un petit sourire satisfait.
"J'étais pas prête !
- Tu crois vraiment qu'ils attendront que tu sois prête ?" La nargua-t-il.
Lucie ne répondit rien, mais se remit en garde, fléchit les genoux et se concentra sur les mouvements du garçon. Cette fois-ci, il fit tournoyer son sabre autour de sa main. La jeune fille, hypnotisée, n'eut pas le temps de parer le coup qui l'atteignit en plein sur le bras. Elle secoua la tête pour reprendre ses esprits, et releva une nouvelle fois sa rapière, bien décidée à éviter le coup.
Enzo n'attendit pas, et essaya encore une fois de l'atteindre. Mais cette fois, elle était prête. Elle para le coup avec habilité, mais n'eut pas le temps d'en porter un à son tour : son adversaire était déjà revenu à l'attaque, et fit pleuvoir une telle avalanche de bottes que Lucie serra les dents et ne put que se défendre, changeant d'angle du poignet à toute vitesse. Elle recula d'un pas, puis de deux, puis en vint quasiment à courir en arrière. Elle s'arrêta en sentant les pierres froides et dures du mur contre son dos.
Juste quand elle allait lâcher la pression et s'incliner, Zoltan lança d'une voix forte qu'il était temps de changer les rôles.
Lucie remua les épaules, avança d'un ou deux pas et contempla Enzo, se demandant ou frapper. Le garçon devait faire une bonne quinzaine de centimètres de plus que lui et avait une garde imparable.
Elle assura sa prise sur sa rapière, et se lança à l'assaut. Le bruit des lames s'entrechoquant devint rapidement envoûtant, comme un tambour léger mais résonnant. Enzo se déplaça vers la gauche, et Lucie le suivit, se concentrant pour ne pas s'emmêler les jambes. La respiration haletante, elle dégagea une nouvelle fois sa lame et repartit à l'attaque, mais cette fois avec une idée derrière la tête. Lorsqu'Enzo bloqua son sabre, elle ne se dégagea pas mais poussa. Elle n'avait pas l'intention de le faire plier (elle n'en aurait pas eu la force), mais elle voulait simplement le distraire. D'ailleurs, le garçon la regardait déjà avec un air intrigué. Profitant de sa surprise, Lucie glissa un pied pour le faire trébucher. Mais Enzo s'était déjà reculé, et appuyait lui aussi avec toute sa force. Lucie plissa les yeux, et s''écarta d'un seul mouvement vers la droite. Son adversaire, déséquilibré, ne put s'arrêter et alla percuter le mur.
Après s'être tapoté le crâne, comme pour vérifier que tout était en place, il se retourna, l'air un peu hagard.
"Pas mal du tout", réussit-il à dire, l'articulation pâteuse.

*

Au soir, personne - pas même Enzo - n'ayant perdu de bras, ils dînèrent en vitesse puis filèrent dans leur chambre, les bras en compote.
Alors que Lucie allait s'endormir, sa porte s'entrouvrit tout doucement. La jeune fille chercha des yeux une arme quelconque. Son choix s'arrêta sur un tabouret, qu'elle empoigna, alors que quelqu'un entrait. Une haute stature à la marche silencieuse... Lucie ne put retenir un soupir de soulagement. Enzo. Celui-ci referma la porte sans plus de façons.
"Tu aurais pu frapper, lança-t-elle en allumant une bougie, puis en retournant se mettre les pieds au chaud dans son lit.
- Je pensais que tu dormais, s'excusa le garçon.
- Justement ! Et qu'y a-t-il de si important que cela vaille la peine que tu me réveilles ?
- Il y a deux choses. Premièrement, il se passe des choses étranges au château. Robyn, tu te rappelles, le garçon qui s'est mis une flèche dans le pied ? Il fait copain-copain avec Anontès et ça ne me plait pas du tout. De mon point de vue, Robyn est le cerveau, Anontès le.. L'exécutant. Je sais que c'est lui qui t'a frappée, ces derniers jours.
- Et comment tu le sais ? Demanda Lucie, soupçonneuse.
- Ce n'est pas le plus important ! Ce qui compte, c'est que la plupart des apprentis sont extrêmement sceptiques à ton égard. Jusqu'à maintenant, ils ne pensaient pas qu'une fille pourrait les dépasser, et tu les as tous surpassés en quelques jours.
- N'exagérons rien.
- Ne fais pas ta modeste ! Ce matin-même, tu m'a à moitié assommé, et tu sais très bien que je suis le meilleur épéiste de notre groupe !
- Et c'est moi qui fait la modeste.
- Très drôle. Bref, j'ai entendu Zoltan.. Qui ne semblait pas être de leur avis. Figures-toi qu'il discutait avec Eomen, Worriack et notre ribambelle de professeurs. Ils sont tous du même avis. Tu es très douée. Trop, peut-être. Ils pensent que ça doit venir du sang...
- Quel sang ?
- Voyons ! Réfléchis ! Qui était ta grand-mère ?
- Bah... La mère de mon père, j'imagine.
- C'était elle. L'Assassin, c'était elle, c'était Denyelle Drake !
- Attends. Tu rigoles, là ? C'est vrai, j'avais entendu quelqu'un mentionner son nom... Mais ce n'était pas possible ! Ça ne peut pas être elle, tout de même !
- Et bien si. Du coup, ils pensent que tu as hérité de ses capacités.
- Mais... J'y pense... Comment tu as fait pour entendre ça ?
- Je devais.. Hum... Refaire mes lacets, répondit Enzo, gêné.
- Tu pourrais au moins faire l'effort de produire un mensonge crédible, soupira Lucie, blasée.
- Bon la fin justifie les moyens, d'accord ? Il – Zoltan- avait l'air de suggérer d’accélérer ta formation, histoire de pouvoir récupérer tes parents plus vite – et aussi soustraire une source d'informations à l'ennemi.
- Purement pragmatique, hein ?
- Le seul problème, c'est qu'il se demandait comment le prendraient les autres.
- Mais qu'est-ce que ça peut leur faire ? Une fois que je les ai récupéré, je rentre chez moi et il n'a pas d'inquiétude à se faire !
- Mais ce n'est pas aussi simple ! S'écria Enzo. Quand tes parents seront libres, ils ne resteront pas les bras croisés, sois-en sûre. Premièrement, Tenkin va savoir que c'est toi qui les as délivrés, du coup que tu es un Assassin, du coup qu'il a intérêt à te... supprimer au plus vite. Par conséquent, tu seras en danger de mort partout ! D'ailleurs, je te rappelle que tu as fait irruption ici uniquement parce qu'un Gardien te poursuivait. Et ce, dans ton monde ! Enfin, dans les points positifs, un bon Assassin de plus peut faire pencher la balance de notre côté...
- Mais qu'est-ce que j'en ai à aire de vos guerres ? Ce sont vos ennemis, pas les miens !
- Depuis le jour où tu es née, ce sont aussi tes ennemis. Pour eux, c'est héréditaire.
- Cette façon de voir les choses es d'un ridicule consommé.
- C'est peut-être ridicule, mais pour l'instant ce sont eux qui ont l'avantage ! Alors on a intérêt à connaître leur façon de penser ! Nous sommes déjà en sous-nombre, Tenkin peut nous attaquer à tout moment ! Réfléchis... Si tu retournes dans ton monde, combien de temps s’écoulera avant qu'on ne te retrouve sous la forme d'un petit tas dans un coin sombre ?
- Mais c'est idiot ! Chez nous, on a des armes à feu, des bombes, et tu viens me dire que Tenkin avec ses épées en acier il va pouvoir nous faire quelque chose ?
- D'abord, sur Kaïdza nous sommes beaucoup plus agiles, silencieux, rapides, tout ce que tu veux, que sur Terre. Du coup il est relativement facile d'éviter les murs et de s'introduire un peu partout. Ensuite, Tenkin a sans aucun doute ses infiltré, qui eux, sont équipés de mitraillettes et de tout ce que tu veux ! En résumé... tu ne seras en sécurité que quand on sera débarrassés de lui."
Lucie le contempla quelques instants. Elle n'avait donc pas le choix. Elle n'avait jamais eut le choix. Le Destin... Était-il si abstrait ? Mais la jeune fille avait pris sa décision ; ne pas croire que tout était écrit à l'avance. Savoir que chaque choix pouvait tout changer.
"Et quelle était la deuxième chose que tu devais me dire ? D'ailleurs, je ne comprends toujours pas pourquoi tu as du me réveiller en pleine nuit pour me parler.
- La deuxième chose ? Demanda Enzo, surprit, et à la fois gêné et anxieux. Je ne pouvais pas la dire devant les autres.
- Quoi donc ?
- Je... Je ne sais pas comment dire ça.
- Ben vas-y ! J'ai un quota de sommeil à respecter, moi !
- Très bien, si tu le prends comme ça, dit le garçon, piqué au vif. Je... Je suis amoureux de toi. Depuis le premier jour. Depuis que nos regards se sont croisés, je ne rêve que de toi, de la douceur de tes cheveux, du son de ta voix, de l'éclat de tes yeux quand tu rit..."
La bouche légèrement entrouverte, Lucie regardait Enzo comme si elle le voyait pour la première fois et qu'il était équipé d'antennes vertes au sommet du crâne, de dents roses, d'une douzaine d'yeux et de trois têtes.
Mais celui-ci, sans ajouter un mot, tourna les talons, claqua la porte et s'en alla.
Le silence de la nuit tomba comme une chape sur la jeune fille, anesthésiant ses pensées, ses réflexions et la plongeant dans le sommeil.
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MessageSujet: Re: La Guilde des Assassins   La Guilde des Assassins I_icon_minitimeSam 1 Oct - 17:44:25

CHAPITRE 9 (2) : FUITES


Donc je n'ai que ça à faire, pensa Lucie. Sauver mes parents, me débarrasser de Tenkin, rentrer chez moi. Simple. Enfin, en théorie. J'imagine qu'en pratique, ça ne pas être aussi facile... Déjà, faut que je me procure cette fichue arme personnelle. Ensuite, traverser la moitié du continent. En essayant de ne pas mourir. M'infiltrer à Tuma. Me débarrasser de ce gênant bonhomme du charmant nom de Tenkin. Rentrer chez moi. Si j'arrive à faire tout ça en moins d'un siècle, et surtout en restant vivante, je peux m'estimer heureuse.
Lucie ferma les yeux, découragée. Tout cela ressemblait à une mission impossible. Elle savait qu'elle devait se lever, mais elle n'en avait pas la force. Elle allait endurer une nouvelle séance d'escrime intensive, enfin, si elle arrivait avant la fin de la leçon. Tout son corps lui faisait mal après celle de la veille.
La jeune fille se leva finalement en maugréant. Elle ne pouvait sans doute pas sécher ce genre de cours !
Elle s'habilla en vitesse, chaussa ses bottes et sortit de sa chambre, priant pour ne pas rencontrer Enzo. Elle n'aurait pas su quoi lui dire après leur discussion de la nuit. Les couloirs étaient déjà déserts. Peut-être que la salle à manger... Mais non, il n'y avait personne.
Tant pis pour le petit-déjeuner, pensa-t-elle en ressortant aussi sec de la pièce. Elle se dirigea vers la salle d'entraînement, et elle allait ouvrir la porte quand un cri perçant retentit. Il y eut le bruit sourd d'un choc violent. Lucie entraperçut une cape rouge et verte.
Son coeur rata un battement. Elle se plaqua dans l'embrasure, réfléchit deux secondes puis ouvrit le battant, se rua à l'intérieur de la pièce et claqua la porte. Elle eut seulement le temps de voir une dizaine de Gardiens foncer sur elle.
"Je crois qu'on a un problème, dit Lucie à Zoltan, qui s'était brusquement interrompu.
- Prends ça", lui dit-il en lui lançant un long objet mince.
La jeune fille attrapa le poignard au vol et le glissa dans sa ceinture. En écoutant les instructions du maître d'armes.
"Prends ton cheval, et vas-t'en. Vas-t'en très très vite. Va à Bélakel, chez Zara. Dépêche-toi !"
Lucie n'écouta plus. Elle se retourna vers la porte, tandis que Zoltan donnait ses instructions à ses élèves. Alors qu'elle allait poser la main sur la poignée, le battant s'ouvrit d'un coup, et une horde de Gardiens déchaînés déboula dans la pièce. La jeune fille fit un croche-pied à l'un d'eux, qui, en s'écroulant, se cogna la tête contre une table totalement innocente – enfin, jusque là. Il tomba par terre, assommé.
Elle en profita pour se hâter de passer sous l'embrasure. Le couloir était désert, la porte d'entrée grande ouverte. Dehors, Assassins contre Gardiens ne faisaient aucun bruit, ce qui les rendait effrayants. Ils formaient une mêlée jusque dans les coins.
L'apprentie obliqua à droite si brusquement qu'elle fit un dérapage contrôlé, reprit son aplomb et fonça dans l'écurie. Elle attrapa la selle et la bride de Sylver, ouvrit la porte de son box et le harnacha en moins de deux minutes. Elle contempla l'étrier bien trop haut par rapport à elle. Elle n'avait aucune chance de réussir à monter dessus sans aide. Voyant la porte, elle se décida. Elle fit sortir l'étalon du box, ferma soigneusement le battant. Elle aligna le cheval à une vingtaines de centimètres du mur de sa stalle, prit appui sur le dessus de la porte et parvint à glisser son pied dans l'étrier. Ce n'était ni gracieux, ni distingué, c'était même assez balourd et ridicule, mais au moins elle était en selle.
Lucie dirigea Sylver vers la sortie de l'écurie. Mais en voyant le chaos, il se cabra en hennissant. Lucie soupira. Elle venait de s'attirer l'attention générale. Vraiment parfait pour disparaître discrètement. Dès que le cheval eut reposé ses antérieurs, la jeune fille le lança au galop, passa en trombe près des combattants et partit à toute vitesse. Ils traversèrent la cour, dépassèrent les maisons barricadées et quittèrent l'enceinte protectrice de la petite ville.
N'ayant qu'un sens de l'orientation modeste, Lucie décida de se diriger vers la forêt à l'ouest de Sennal, puis de faire le point. Elle laissa Sylver galoper encore et encore, puis le força à ralentir pour le ménager. Il n'était même pas essoufflé.
Le temps semblait passer avec la lenteur d'un escargot, tandis que la plaine défilant était d'un ennui mortel.
Aux alentours de midi, après ce qui lui semblait des heures de chevauchée, Lucie décida de faire une pause, laissant Sylver se désaltérer à un point d'eau et manger un peu d'herbe. Elle en profita pour fouiller les fontes de la selle, qui contenaient miraculeusement un peu de viande séchée qui avait du atterrir là longtemps auparavant... Il y avait aussi une bourse à moitié remplie, une vieille carte et une gourde vide. Le matériel du parfait petit aventurier. Lucie remplit l'outre de cuir, puis étudia le parchemin usé. Elle devait continuer vers l'ouest pour rejoindre la forêt, puis, lorsqu'elle l'aurait rejoint, elle pourrait en suivre la lisière vers le sud. Une fois la fin de la forêt atteinte, elle continuerait vers l'ouest, en direction de la rivière Makaha et de Flobelle, la ville la plus proche. Une fois là, elle suivrait le cours d'eau, et, arrivée à la source, elle se dirigerait vers le sud-ouest, direction Bélakel.
Elle se releva en maugréant, resserra la sangle de Sylver et se hissa en selle grâce à une branche d'arbre.

*

Le lendemain, à midi, Lucie arrivait à la lisière de la forêt. Celle-ci, accueillante de loin, donnait un tout autre sentiment de plus près. Froide et sombre. Les arbres dominaient le paysage, tels des soldats dans un garde-à-vous perpétuel.
La jeune fille descendit donc vers le sud, soulagée de ne pas devoir s'enfoncer dans les ténèbres. Apparemment, on n'appelait pas cet endroit "Forêt des Égarés" pour rien. Essayant d'oublier son ventre qui grondait, elle prévit mentalement de trouver quelques fruits ou de chasser un peu le soir même.
Le soir en question, après avoir vu des lapins gambader toute la journée, la jeune fille fabriqua un collet avec de la ficelle trouvée dans les fontes. Elle partit à la recherche de nourriture, et ramena ce qui ressemblait à des pommes. Sylver en happa une au passage et la mangea goulûment, ce qui voulait sans doute dire que c'était comestible. Lucie engloutit alors toute sa récolte, affamée par un longue journée de chevauchée.
Après avoir vérifié que Sylver était bien attaché, elle s'enroula dans son tapis de selle et s'endormit en essayant d'oublier la tenace odeur équine.

*

Au milieu de la nuit, Lucie fut réveillée par le hurlement d'un loup. Elle se leva, et constata que la lune était pleine. Le cri du loup reprit de plus belle, et bientôt une meute entière chantait à la gloire de la Lune.
Incapable de se rendormir, la jeune fille s'enfonça à travers les bois, son subconscient la guidant. Pénétrant dans une clairière, elle les vit.
Perché sur un rocher, sa silhouette se découpant dans la lumière fantomatique de l'astre nocturne, le mâle dominant avait la tête renversée sur un long hurlement.
Tout autour, sa meute lui répondait, baignée dans la même atmosphère de mélancolie.
Lucie se laissa tomber par terre et les observa longuement.
Les louveteaux tentaient eux aussi d'imiter les adultes, mais leurs vocalises ne les égalaient en rien. Il se rasseyaient, l'air boudeur, lorsque leurs mères leur donnaient un petit coup de patte pour les calmer.
Une hiérarchie incompréhensible d'un point de vue humain, parfaitement claire d'un point de vue bestial. Cette symbiose dans leur chant... Une unité, tout entière pour protéger la meute et assurer sa subsistance.
On traitait les humains de loups, ne pensant qu'à eux-mêmes, mais ces animaux les surpassaient par tous les points. Dans le courage, dans la loyauté...
Pensive, Lucie retourna à son bivouac, récupéra un lapin dans son collet, harnacha Sylver et se mit en route.
Droit vers l'ouest.

*

Peu avant midi, des chuchotements et des piétinements alertèrent Lucie.
Le sentier, qu'elle suivait depuis une bonne heure, était bordée sur ses deux côtés par d'épais buissons. Aussi, tout pouvait surgir sans préambule.
La jeune file n'avait fait que vingt mètres de plus, quand un gros bonhomme barbu lui barra le passage. Il portait des guenilles si sales qu'il était impossible d'en déterminer la couleur d'origine. Un rictus mauvais s'étira sur ses lèvres.
"Tu ne sais pas qu'il est dangereux pour une demoiselle sans défense de faire route tout seule ?
- Qui te dis que je suis seule.. dit Lucie en regardant Sylver, qui n'avait pas bronché mais était tendu comme un arc. Et que je suis sans défense ?"
Elle ne dégaina pas son poignard. Pas encore. Pas sans savoir combien ils étaient.
"Descends de ton cheval, donne ma ta bourse, et ut auras peut-être la vie sauve", déclara l'inconnu sans hésitation.
En baissant la tête, Lucie obtempéra, descendit de l'étalon et s'approcha du brigand. Elle avança la main vers sa ceinture...
D'un seul mouvement, elle dégaina sa dague, tordit le bras de l'homme, le tourna face à ses sbires et lui posa la lame sur la gorge.
"Sans défense, hein ?" le nargua-t-elle.
L'autre ne répondit rien, mais, de son bras libre, lui donna un coup de coude dans le ventre. Pliée en deux par la douleur, elle ne put résister quand il se dégagea de sa prise. Cependant, avant qu'il ait pu s'éloigner, elle lui planta son poignard dans le bras, qu'il avait très mou.
Comme les acolytes de son ennemi semblaient se réveiller, elle tira sa lame d'un coup sec, provoquant une fontaine de sang.
Elle se détourna, bondit sur Sylver, ne prit pas la peine de glisser les pieds dans ses étriers et ça l'étalon au grand galop. Celui-ci, s'en donnant à cœur joie, maltraita la troupe quand ils la traversèrent, puis s'éloigna à toute vitesse. Bientôt, ils n'entendirent plus rien, puis les voleurs disparurent à l'horizon.


Dernière édition par Reflets de Lune le Lun 14 Mai - 15:38:41, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: La Guilde des Assassins   La Guilde des Assassins I_icon_minitimeMer 18 Jan - 17:25:46

CHAPITRE 10 : BELAKEL


Lorsque le soir tomba, Lucie pouvait déjà apercevoir Flobelle à quelques centaines de mètres. Elle se dépêcha donc pour arriver avant la nuit, en espérant que les gardes n'auraient pas encore fermé la porte.
« Où vas-tu ? L'apostropha l'un d'eux.
- Euh... Eh bien, à l'intérieur.
- Tu as quelqu'un pour t 'héberger ?
- Non.
- Alors va à l'auberge du Chat qui Dort. Tu y seras bien accueillie. C'est dans cette rue », expliqua-t-il en désignant une rangée d'échoppes.
Lucie n'arrivait pas à savoir si il était gentil, si il cherchait à rentabiliser l'auberge ou si il voulait éviter le désordre. Ce n'était sans doute pas la première proposition. Finalement, Lucie le remercia et, menant son cheval par la bride, se dirigea vers l'auberge en question.
Après s'être assurée auprès d'un palefrenier que son cheval serait bien traité, elle pénétra dans l'établissement. L'intérieur était sombre, mais plus ou moins propre, le moins l'emportant sur le plus en de nombreux endroits. La gérante, une femme tellement joufflue qu'il, était difficile pour elle de joindre ses mains devant elle, s'approcha de Lucie et lui sourit aimablement.
« Que désires-tu ?
- Euh... une chambre pour la nuit.. et un dîner, s'il te plaît. »
Elle tenta de croiser ses mains, mais après avoir vainement essayé d'allonger suffisamment ses bras, elle renonça.
Lucie pensa avec une certaine ironie qu'elle était ridicule. Elle était armée jusqu'au dents, et même plus, et elle devait sans doute être capable de laminer chaque personne de cette taverne en moins de temps qu'il n'en fallait pour le dire, et elle bafouillait comme une fillette. Ridicule.
Finalement, elle s'installa à une table inoccupée, mangea un souper composés de divers ingrédients, la plupart étant inidentifiables, ce qui valait sans doute mieux si elle ne voulait pas passer le restant de sa vie au petit coin.
Après avoir copieusement mangé, elle se rendit dans sa chambre et s'écroula comme une masse sur la paillasse d'aspect suspect.

*

Ce fut le soleil, à l'aube, qui la réveilla. Elle ouvrit les yeux et se demanda calmement où elle était, avant de se rappeler de ses dernières aventures.
Elle s'extirpa de son lit, récupéra son poignard qu'elle avait posé à coté d'elle durant la nuit, lorsqu'il lui était rentré dans le dos, l'interrompant dans un rêve particulièrement amusant.
Après avoir fait le plein de provisions, elle se rendit aux écuries, sella Sylver et partit sans payer. Personne ne la remarqua ; les habitants étaient bien trop occupés par leurs propres malheurs et leurs problèmes personnels.
Le début du voyage fut un peu ennuyeux, surtout que Lucie dut se cacher dans un bosquet deux reprises ; finalement, son séjour gratuit n'était pas passé inaperçu. Puis tout devint encore plus ennuyeux ; la perspective d'un bon combat l'avait amusée, mais l'adrénaline retombait à présent, et la monotonie du voyage recouvrait son humeur comme une chape de plomb.
Vers midi cependant, elle eut une bonne distraction : elle contempla pour la première fois de sa vie l'endroit le plus extraordinaire de Kaïdza ; le Lac Tëtal. Les poètes lyriques s'en étaient inspiré pour des dizaines de poèmes, de chants et d'odes à la beauté, au la délicatesse et à la sauvagerie tout à la fois.
« Wow. »
Cette longue phrase suffisait à exprimer son étonnement, son émerveillement et tout ce qui allait avec.
Par cette chaude matinée d'été, le soleil faisait briller l'eau de mille éclats ; le contraste de l'herbe verte, du sable blanc puis de l'eau merveilleusement turquoise était magnifique. Un vent léger balayait la surface, formant de petites vaguelettes aux bords, alors que le milieu restait tout à fait calme. Le Lac semblait une incarnation du contraste changeant et lunatique. Le simple mot lac semblait maintenant obligé de prendre une majuscule.
Lucie, surmontant sa surprise, s'avança au bord de l'eau. Mais, aussi loin qu'elle aille - du moins sans se mouiller les pieds – elle ne pouvait voir l'autre côté du lac. Le bleu ne s'interrompait pas jusqu'à l'horizon.
Soudain, elle se rappela qu'elle venait de passer trois jours sans mettre un doigt de pied dans l'eau, et environ six mois sans nager. Sautant sur l'occasion, elle descendit de Sylver en éclair, le désella, l'enjoignit de l'attendre, retira ses bottes, la plupart de ses vêtements et se laissa aller dans l'eau. Celle-ci était glaciale, mais la perspective d'une petite immersion l'encourageait. Avec un petit frisson, elle se boucha le nez et plongea la tête sous l'eau. Il lui semblait entendre un son étrange, n'ayant pas sa place dans le milieu aquatique ; mais elle n'y prit pas garde et continua de faire trempette.
Le soleil avait atteint le milieu de sa course ; elle avait réussi à entrainer Sylver dans l'eau et s'il avait d'abord eut l'air de détester ça, il semblait maintenant amusé, et faisait des bulles en soufflant sous la surface. Lucie se demandait parfois si c'était elle où lui qui avait choisi l'autre ; et dans ces moments-là, l'étalon la regardait de ses yeux bruns profonds, et Lucie pouvait sentir une chose, une chose étrange et innommable, qui lui assurait que jamais Sylver ne l'abandonnerait, et que c'était lui qui l'avait choisie. Il savait des choses, des choses que ses mimiques de cheval ne pouvaient pas exprimer. Il avait connaissance du destin final du monde, c'était la seule – et étrange – certitude Lucie à son sujet.
Elle détourna le regard du cheval, qui sortit de l'eau et s'ébroua. Il semblait avoir suffisamment fait trempette pour se jour-là. Pour se sécher, il se roula par terre dans l'herbe fraîche. Lucie se dit qu'elle devrait peut-être sortir le sécher pour éviter qu'il tombe malade,mais quelque chose de plus fort que son lien avec l'étalon l'en empêchait. C'était comme une force rude, douée d'une vie et d'une conscience propre, qui l'en empêchait amicalement. Elle devait faire quelque chose, elle le sentait, mais ne savait pas quoi.
Elle se secoua ; voilà qu'elle devenait folle et qu'elle pensait avoir des intuitions. Comme ça ne marchait pas très bien, elle se plongea la tête dans l'eau pour se rafraîchir les idées. C'était cela ! Le bruit étrange qui montait des profondeurs du lac, c'était cela, cette force étrange et mystérieuse, et néanmoins amicale.
Elle se décida.
Lucie nagea vers le milieu du Lac, mue par un instinct et une certitude infaillibles.
Arrivée à une distance suffisante, elle plongea dans l'eau, la tête la première. Celle-ci était tellement claire qu'elle pouvait voir les poissons s'enfuir à son approche et les algues, quelques mètres plus bas, onduler avec le courant.
Alors, elle le vit.
A moitié caché par des fougères aquatiques, le coffret l'attendait.
Comme Lucie s'en approchait, la mélopée enfla démesurément,. La jeune femme avait besoin d'air, mais elle descendit, toujours opus loin, pour s'emparer du coffret. Lorsqu'elle posa les mains dessus, la musique cessa, la force l'abandonna. Elle se retrouva aussi faible et ridicule qu'un lapin sans pattes, coincé dans une baignoire. L'eau, bien plus glaciale en profondeur qu'à la surface, commença à paralyser Lucie, qui battit des jambes pour remonter. La boîte ralentissait sa remontée.
Coincée à quelques mètres à peine de de la surface, elle sentait ses poumons prêts à éclater. Dans un sursaut de volonté, elle agita les pieds et battit l'eau de sa main libre.
Alors sa t^te creva la surface, et elle put inspirer une longue goulée d'air, soulagée.
Encore essoufflée, Lucie nagea calmement jusqu'à la rive. Elle retrouva avec bonheur le sol qui remontait en pente douce, ferme sous ses pieds. Elle se changea, et mit ses vêtements trempés à sécher sur une pierre, et ouvrit le coffret.
Dedans, il y avait un petit cylindre de pierre, exactement tel que Zoltan l'avait décrit, quelques mois auparavant. Se remémorant ses conseils, elle fouilla le fond du coffret, et trouva un petit parchemin roulé très serré, ainsi qu'un dizaines de pièces étranges aux formes bizarres et incompréhensibles. Dessus, il n'y avait que quelques mots.

Une arme redoutable,
Naturelle et rétractable
Un animal orange, jaune ou brun
Aux yeux de sérénité empreints
Un profession guère appréciée
Bien qu'utile ; méprisée.
Découvre les mystères du secret ;
Et pour toi s'ouvrira le coffret.

Lucie relut très exactement sept fois ces lignes.
Ah.
Sa raison suivi alors le chemin le plus facile. Elle devait, en ouvrant ce cylindre, trouver son arme secrète, du moins si c'était bien la sienne et qu'elle ne s'était pas trompée sur tout la ligne. Elle essaya le premier mot qui lui vint à l'esprit ; secrète. Elle tourna les sept lettres du cylindre pour former le mot, tira délicatement sur ses deux extrémités ; rien.
Forcément. La fatalité lui retomba dessus.
Un animal orange, jaune ou brun... Hum.. Les lions, c'est jaune. Mais ça colle pas. Plutôt.. Lionne ?
Une nouvelle fois, rien ne se passa.
C'est pas de la tarte, cette énigme.
Elle essaya ensuite vingt-sept mots, différents, mais aucun ne déclencha l'ouverture du mécanisme. Vaincue, elle décida d'y réfléchir plus tard, prépara son paquetage et enfourcha Sylver, prête à continuer son voyage.

*

Le surlendemain au soir, Lucie arriva à Bélakel. C'était une cité fortifiée, ceinte de hautes murailles de pierre grise, avec seulement quelques portes gigantesques, soigneusement gardées par de nombreux gardes, dont la plupart, sans doute, était à la solde de Tenkin.
En s'avançant vers le poste de garde, qui ressemblait en fait à une douane, Lucie s'aperçut que tout le monde devait abandonner ses armes à l'entrée. Vite, elle fourra son poignard dans sa botte, puis s'avança vers la porte, l'air de rien.
« Pourquoi viens-tu à Bélakel ? » L'interrogea brutalement le garde de faction.
Vite, une excuse plausible.
« Pour rendre visite à... une amie.
- Entre, et ne gêne pas le passage », grommela le garde, comme déçu de ne pas pouvoir l'importuner davantage.
Sympathique, ironisa la jeune femme en passant sous l'arche de pierre. Il ne lui restait donc plus qu'à trouver ladite Zara.
Elle fit quelques pas, et se retrouva immédiatement dans l'artère principale de la cité, constituée essentiellement d'échoppes et magasins divers. Les cris des marchands, essayant d'attirer les clients, retentissaient de toutes parts. Partout, des gardes en uniforme, l'épée au côté, passaient et repassaient, écartant sans ménagement les miséreux qui avaient l'audace de leur demander l'aumône. Lucie eut soudain l'impression de s'être jetée en plein milieu d'un nid de guêpes... couverte de miel. Elle vit un voleur se faire prendre la main dans le sac. Vu les plaisanteries et les rires gras des soldats qui l'avaient attrapé, on allait lui couper la main droite. La jeune femme songea qu'elle avait intérêt à se faire oublier, si elle voulait pouvoir continuer à se servir de toutes les parties de son corps.
Aussi baissa-t-elle l tête en passant devant le petit groupe de gardes occupés à maltraiter le malandrin.
Pour obtenir des informations, le choix de Lucie se rabattit sur un gamin au vêtements en loques. Elle descendit de Sylver, attrapa ses rênes d'une main sûre, et se dirigea vers le coin de la rue.
« Sais-tu où habite une certaine Zara ? » Lui demanda-t-elle en s'approchant.
Le gamin commença par hocher négativement la tête, et Lucie porta la main à sa bourse. Alors son regard s'éclaira.
« Pour une pièce d'argent, je connais sûrement le chemin, sourit-il, dévoilant un trou à la place de ses dents de devant.
Lucie lui donna la pièce en songeant que c'était du vol non-déguisé. Le prix était exorbitant. Le gamin pourrit se payer une semaine de nourriture rien qu'avec ça. Mais elle n'avait aucun talent pour le marchandage, et surtout, elle était pressée. Elle suivit son guide miniature dans les ruelles de la capitale.
Arrivé au détour d'une rue, le gamin pivot brutalement vers la droite. Le temps que Lucie le rattrape, il était déjà monté sur le toit d'une maison et s'enfuyait en riant aux éclats. La jeune femme jura d'une bien jolie manière, puis décida que le couper en tranche puis le transformer en saucisson ne lui apporterait rien, absolument rien.
Elle réfléchit quelques instants. Elle aurait préféré éviter cela, mais tout l'y poussait. Elle examina le mur face à elle ; il étai très vieux, hérissé de briques et de pierres disjointes, tandis que le lierre poussait selon son bon vouloir. Elle se résolut, attacha Sylver à un anneau et crocheta la première prise. Alors qu'elle commençait à s'élever, elle se rappela que c'était la deuxième fois de sa vie qu'elle escaladait une maison. La première avait eu lieu trois ans plus tôt, lors d'une phase rebelle. Elle s'était jointe à un groupe dans la ville, qui passaient leur temps à escalader les bâtiments. Elle s'était cassé un bras le jour même - non sans s'être beaucoup amusée – et s'était promis de ne jamais recommencer.
Au milieu de son ascension, une pierre se détacha de sous ses pieds, et elle eut la mauvaise idée de regarder en bas. Sa vue se brouilla quand elle vit le sol, bien trop loin de ses pieds à son goût. Elle ferma les yeux, tentant de reprendre contenance. Ses muscles, tendus à l'extrême, criaient grâce, mais elle refusa de céder.
Le souffle court, la jeune femme se hissa enfin sur le balcon, situé à mi-hauteur du bâtiment. Après quelques minutes de pause, elle reprit son escalade. Encore une fois, une pierre se décrocha, sous sa main cette fois, et son cœur rata un battement. Elle se rattrapa de justesse, après s'être écorché le bras sur une pierre de forme vicieuse.
Enfin, elle arriva en haut, l'honneur et les doigts meurtris.
En contemplant la vue qui s'offrait à elle, Lucie eut le souffle coupé et oublia la douleur.
D'innombrables toits de tuiles, rouges, verdâtres, et mêmes bleues, côtoyaient des toits plats. Entre certains d'entre eux, il n'y avait qu'une enjambée, tant les ruelles qui les séparaient étaient étroites. Le bourdonnement de l'activité du soir semblait éloigné, comme filtré par un voile transparent. Tout au bout, surmontant l'horizon, se trouvait une énorme coupole, magnifiquement décorée de sculptures et de dorures de toutes sortes.
« Qu'est-ce que tu fais là ? »
La voix rauque interrompit Lucie dans ses pensées. Il ne fallait tout de même pas que ça devienne une habitude ! Et puis, les hommes de ce pays ne savaient vraiment pas parler aux femmes. Mais elle ne faisait pas tellement féminine, sur ce toit, c'était vrai.
« Je me balade », répondit-elle en serrant son bras blessé.
Son poignard était dans sa botte. Il fallait qu'elle parvienne à l'extraire sans attirer l'attention de l'autre.
« Je vois ça. Et bien tu vas balader ta bourse de ta ceinture jusqu'à ma main. »
Mais qu'est-ce qu'ils avaient avec son argent ? Et puis, franchement, ça ne les étonnait pas de voir une femme, seule, sur un toit ?
« J'ai déjà rencontré des brigands qui m'ont dit ça , mais moins joliment.
- Et alors ?
- Il y en a un qui se balade avec un trou dans le bras et moitié moins d'amour-propre depuis.
- Oui, mais moi, j'ai mes amis. »
Il avança d'un pas, sans doute lassé de cette discussion. C'était un petit bonhomme, trapu, musclé, au visage chafouins et aux yeux rusés. Ses « amis » attendaient en un rang serré derrière lui.
« Moi aussi j'ai mon ami », dit Lucie, en se baissant vivement et en dégainant son poignard.
Mais, après avoir mouliné dans le vide quelques instants, sans crier gare, elle fit vote-face et se laissa tomber sur le balcon qu'elle avait escaladé un peu plus tôt.
Elle examina la ruelle, sauta sur le mur de droite, et, en tentant de ralentir sa chute avec une gouttière, l'arracha. La tôle se plia avec un grincement effroyable, mais elle n'en avait cure. Elle se laissa glisser au sol, détacha l'étalon et l'enfourcha en deux temps, trois mouvements. Elle le lança au galop, et, avant que le malandrin ne soit arrivé au bas de la maison, elle avait déjà tourné au coin de la rue.

*

En jubilant intérieurement, Lucie obliqua à droite dans une ruelle encore plus étroite que la précédente, manquant ainsi de renverser une passante qui lui adressa un geste obscène de la main.
Lucie lui répondit par un pied de nez... et s'arrêta net. Devant elle, le brigand du toit , planté bien droit, souriait d'un air mauvais, flanqué d'une dizaine de subalternes.
« Personne, gronda-t-il, n'échappe à Elio.
- Excusez-moi, je ne savais pas », dit Lucie en faisant reculer Sylver avec lenteur.
Celui-ci s'arrêta lorsque sa croupe percuta l'un des acolytes d'Elio.
Lucie fit une grimace et les abreuva de toutes les insultes qu'elle connaissait. La liste était longue.
Quand les brigands essayèrent de la jeter à bas de Sylver, elle taillada leurs doigts crasseux et sauta à terre. Elle donna une claque sur la croupe de l'étalon, qui s'enfuit comme si il avait le diable à ses trousses.
Lucie s'adossa au mur et moulina avec son poignard, tenant ainsi ses adversaires à distance. L'un d'eux tenta une feinte malhabile. Elle para l'attaque et riposta aussitôt, ouvrant la gorge de son ennemi qui s'écroula au sol. Mort.
Elle ne ressentit rien. Son entraînement avait pris le contrôle de ses gestes, elle agissait sans réfléchir, rodée par des mois d'entraînement. C'était comme si elle n'était plus aux commandes, elle regardait la scène, simplement.
La mort d'un deuxième de leur camarades énerva les voleurs, qui attaquèrent alors tous ensemble. Lucie, haletante, sentait ses bras devenir lourds comme du plomb. En tenant en respect deux des malandrins, la jeune femme décocha une coup de pied dans le menton de celui de gauche, qui s'écroula. Mâchoire cassée, nuque brisée.
Elle profita de la brèche pour s'y engouffrer.
Hélas, les brigands connaissaient beaucoup mieux la ville qu'elle, Ils la coincèrent une nouvelle fois, dans une petite ruelle très sombre, tant les maisons étaient haute. De plus, la nuit tombait.
Adossée à une porte, la jeune fille sentait sa dernière heure venir...
Alors, la porte derrière elle s'ouvrit. Une main la saisir, la tira à l'intérieur et referma le battant.


Dernière édition par Reflets de Lune le Lun 14 Mai - 15:38:21, édité 1 fois
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La Guilde des Assassins _
MessageSujet: Re: La Guilde des Assassins   La Guilde des Assassins I_icon_minitimeDim 26 Fév - 15:26:59

CHAPITRE 11 : ZARA


Il faisait très sombre. Lucie cligna plusieurs fois des yeux, histoire d'y voir quelque chose dans le noir d'encre l'environnant. La première chose qu'elle remarqua fut une bonne odeur de soupe chaude. La deuxième chose, qu'elle vit, cette fois-ci, était une femme d'à peu près sa taille, vêtue d'une longue robe beige brodée de brun, fortement décolletée.
Elle possédait de grands yeux de biches coiffés de cils délicats, avec en-dessous un petit nez retroussé. Une bouche ferme et une mâchoire carrée complétaient le tableau, donnant une impression de force immuable.
« C'est elle. »
Sa voix chantante déclencha du mouvement dans la pièce ; des rideaux furent tirés, laissant la faible clarté du soir illuminer l'endroit.
« Vous pouvez nous laisser seules. »
Tout un contingent de serviteurs aux fonctions pas forcément faciles à deviner sortit de la salle. Celle-ci, très grande, était aménagée d'une manière étrange. Un grand tapis brodé occupait tout l'espace, bordé de chandelles. Au bout, il y avait une sorte d'estrade en bois, surélevée de quelques pieds par rapport au sol. Les murs exposaient aux visiteur des portraits, des toiles au prix sans doute exorbitant vu le coup de pinceau et la taille des signatures.
Lucie, gênée comme un moineau au milieu d'une piscine, toussota.
« Je peux savoir qui vous êtes, au juste ?
- Tu ne me reconnais pas ? Zoltan a, dans ce cas, bien mal fait son travail. »
La jeune fille réfléchit deux secondes, le temps de permettre à ses neurones de se remettre en marche.
« Vous êtes Zara ?
- Oui.
- C'est marrant, justement, je vous cherchais. Et de toute façon, Zoltan n'aurait rien put faire de plus, étant donné mon départ assez... précipité.
- Je sais, j'ai reçu un pigeon voyageur ce matin-même. La plupart des Assassins sont plus ou moins entiers, et ont pu s'échapper en empruntant les tunnels pour prendre l'ennemi à revers... »
Zara décrivit ensuite la technique dans tous ses détails, passionnée par ce qu'elle racontait, alors que la seule chose que Lucie attendait, c'était de savoir si Enzo allait bien.
« Enzo va bien ? Finit-elle par l'interrompre, à bout de patience.
- Qui donc ? Est-ce un Assassin ?
- Un apprenti, comme moi. Il est doué – plus que moi, mais...
- Plus que toi ? Ça m'étonnerait. »
Elle fit une pause, puis tira deux fauteuils d'un renfoncement dans le mur, et fit asseoir Lucie.
« Raconte-moi comment tu es arrivée ici.
- Alors que j'étais arrivée à une heure, disons, tardive, pour le cours d'escrime, j'ai vu un de nos chers Gardiens. Je suis rentrée vite fait dans la salle, histoire de ne pas mourir bêtement, embrochée par une épée. Zoltan m'a dit de partir et de venir ici et de vous trouver. J'ai emprunté Sylver et... Sylver ? Où-est-il ?
- Ne t'inquiète pas, nous l'avons récupéré. Il est en sécurité dans les écuries. »
Lucie narra son périple, sans oublier de parler du coffret qu'elle avait trouvé dans le Lac Tëtal.
« Le problème, c'est que les énigmes, c'est pas vraiment mon truc. Vous pourriez peut-être...
- Non. Chacun doit résoudre le mystère lui-même. Sinon... Sinon.. Enfin, c'est une tradition. Tu trouveras la réponse que le temps sera venu. »
Elle avait prononcé le mot tradition en y ajoutant mentalement une majuscule.
« En attendant que tu découvres la clef de cette énigme, nous allons reprendre ton entraînement. Je vois que tu en as besoin, ajouta-t-elle en lançant un coup d’œil accusateur à la manche trempée de sang de Lucie.
- Je me suis fait ça en grimpant sur un toit, expliqua-t-elle.
Je sais », répondit tranquillement Zara.

*

Lucie tarda à trouver le sommeil. Après s'être tournée et retournée pendant deux heures, elle sombra enfin dans l'oubli, et fut emportée... loin.
Il fait sombre. Tout est silencieux, lugubre, comme dans un cimetière mais sans tombes. Le vent hurle dans les branches d'arbres invisibles. A sa grande surprise, Lucie est debout, dans les rues de Bélakel. Il n'y a personne, que le silence et la lune, telle l’œil rond et brillant d'une chouette dans le ciel noir et sans étoiles. Soudain, l'astre lumineux commence à s'effacer, doucement, puis de plus en plus vite. Une éclipse. L'astre devient rouge en s'effaçant, puis disparaît complètement.
Alors, des cris retentissent. Le visage du brigand qu'elle a tué apparaît. Il s'approche d'elle, ni mauvais, ni menaçant, juste.. triste. Angoissé.
« Pourquoi m'as-tu tué ? Je voulais juste un peu d'argent pour nourri ma famille qui a faim, mes enfants qui pleurent parce qu'il n'y a rien à manger...
- Tu voulais me tuer !
- N'as-tu jamais tué quelqu'un ? Demanda l'homme en montrant sa gorge ouverte, où le sang avait cessé de passer.
- C'est de ta faute ! Je n'ai fait que me défendre ! »
Mais Lucie tombe à genoux, vaincue par la culpabilité, par cette angoisse qui monte et déferle sans attendre, qui l'envahit et la submerge, qui l'empêche de respirer et qui l'étouffe. Vite, elle doit se relever.
« Je voulais juste ton argent..
- Je ne voulais pas mourir ! C'était toi ou moi !
- Pourquoi avoir lutté ? Tu aurais pu abandonner la vie à cet instant-là, je serais vivant, ma famille ne me pleurerait pas...
- J'ai une mission à accomplir ! »
Le rappel de cette mission lui donne une rage de vivre insoutenable, elle se relève avec difficulté, s'aidant de ses mains, refusant de renoncer si facilement.
Mais à présent, des dizaines d'autres visages s'approchent d'elle, jeunes ou vieux, mais tous avec la même expression mélancolique sur le visage.
« Je n'avais rien fait de mal ! »
« J'ai toujours nourri mes enfants du mieux que j'ai pu ! »
« On m'a tranché la gorge au détour d'une ruelle ! »
« Ce n'est pas moi ! S'époumone Lucie. Ce n'est pas moi qui vous ai tués ! Je vous en prie, allez-vous en ! »


*

Le lendemain matin, lorsqu'un serviteur conduisit Lucie à la salle à manger pour le petit-déjeuner, elle avait de grands cernes mauves sous les yeux et tenait à peine debout. Elle s'assit lourdement sur un siège et soupira profondément.
« Ça ne va pas ? S'étonna Zara en arrêtant de mâcher.
- Je manque un peu de sommeil.
- Un peu.
- Oui, bon, j'ai pas fermé l’œil de la nuit, sauf une fois environ deux secondes et demie. »
Zara ne répondit rien, comme si elle savait ce qui allait suivre. Lucie réfléchit longuement, ne voulant pas donner trop vite satisfaction à son hôtesse, mais en même temps, souhaitant se débarrasser d ces fâcheux cauchemars.
« Les... Les gens que vous avez.. tués. Est-ce qu'ils... Est-ce qu'ils reviennent vous hanter ?
- Oui. Bien sûr.
- Et c'est... normal ?
- Normal pour quelqu'un de normal. Si ça ne te perturbait pas de tuer ces gens, alors je m'éloignerais tout de suite de toi et je prendrais une dizaine de gardes du corps. C'est ce regret de la mort que nous donnons qui fait de nous ce que nous sommes. Nous... Nous tuons, mais finalement c'est pour une bonne cause. Quelqu'un a dit « La fin justifie les moyens », dans ton monde, un certain Machiavel. Je ne le pense pas. Rien ne rendra la vie à ceux que nous avons tués, même si c'est pour une bonne cause. Mais en même temps... Il n'y a pas de moyen de faire autrement.
- Comment avez-vous fait pour que ça s'arrête ?
- C'est ta culpabilité qui te fait voir ces images. Elle pervertit ton inconscient, s'infiltre dans ton esprit et corrompt ton âme. Si tu ne la combat pas, elle finira par te convertir à sa noirceur, tu prendras tout ce que tu fais pour des erreurs, et tu finiras par ne plus distinguer le bien du mal.
- Et donc ? Comment je peux faire ?
- Examine les raisons pour lesquelles tu as tué ces gens. Sont-elles justes ?
- Oui. Enfin... Je crois.
- Sont-elles justes ? Tu dois en être sûre.
- Oui, elles le sont.
- Un peu plus d'enthousiasme, s'il te plaît.
- Oui, elles le sont, je fais ça pour sauver le monde d'un gars qui veut en envahir un autre pour tuer tout le monde !
- Eh bien voilà, c'était pas si difficile, dit Zara en souriant légèrement. Les cauchemars ne reviendront plus. »
Elles gardèrent le silence quelques instants, seulement troublé par le bruit de leur mastication.
« Crois-tu au destin ? Demanda soudainement Zara.
- Non. Je n'aime pas l'idée d'autre chose que moi décide de mes choix. Je fais ce que je décide, et les étoiles, la roue et je-ne-sais-quoi n'y changent rien.
- Bien. »

*

« Tiens, voici une épée », dis le serviteur de Zara, censé enseigner l'escrime à Lucie.
La jeune femme attrapa l'arme au vol. Merci de l'information, j'aurais pas deviné sans ça, ironisa-t-elle.
Les genoux fléchis, elle se plaça en garde face au vieil homme à la barbe grise. Le défiant du regard, elle attendit son attaque. Celle-ci vint, lente et prévisible en comparaison des passes habiles d'Enzo auxquelles Lucie était habituée. Elle para donc le coup avec facilité, et riposta dans la foulée, se fendant d'un pas en avant.
Mais son adversaire n'était pas né de la dernière pluie, et il para le coup avec la garde ouvragée de son sabre. Il semblait, jusque là, avoir testé Lucie. Maintenant se déchaînerait sa véritable puissance.
La jeune femme n'attendit pas la riposte, et croisa de nouveau le fer, de plus en plus vite, les sifflements et les arrêts au son métallique se succédant à toute vitesse. Ils tourbillonnaient au centre de la pièce, deux boules d'énergie pure. Il semblait à Lucie qu'il s'était formé comme un cocon protecteur autour d'elle, un cocon d'acier. Dès qu'un corps étranger menaçait d'y pénétrer, elle réagissait au quart de tour, bloquant l'attaque d'un coup sec. Après quelques minutes d'un combat effréné, elle aperçut enfin la faille, et s'y précipita. En voulant parer une attaque venant du haut, son adversaire avait laissé son bras droit découvert, et par là-même une bonne partie de son anatomie.
Vive comme l'éclair, Lucie lui décocha un coup de pied dans l'estomac, et, alors qu'il était déséquilibré, lui pointa son épée sous la gorge.
« Et rusée avec ça », sourit le vieil homme.

*

Après quelques jours, Lucie osa enfin s'aventurer seule dans les ruelles tortueuses de Bélakel. Armée de son poignard, elle déambulait sans peur entez les échoppes et les maisons.Mais c'est plusieurs mois après son arrivée dans la ville qu'elle découvrit une information intéressante.

Ce jour-là, elle était partie parcourir la grande rue marchande, passant ainsi devant l'armurier. Elle réfléchissait toujours au secret de l'énigme. Le soir, après des entraînements plutôt gratifiants, elle s'écroulait sur son lit sans prendre le temps d'y penser.
Mais ce jour-là, ayant reçu une permission, elle avait décidé d'y consacrer son après-midi...
L'ambiance dans la rue était grouillante. Les gens se baladaient pour faire leurs achats, les crieurs annonçaient leurs marchandises, leur vie suivait son cours comme une chenille suit la nervure d'une feuille.
« Armures de Bélakel ! Armures de Bélakel ! En association avec une épée Coupedur, c'est la victoire qu'on vous assure ! »
Le slogan fit pouffer Lucie. Elle n'en avait jamais entendu d'aussi stupide. Elle aperçut un chat qui se faisait les griffes, son poil jaune-orangé luisant au soleil. Le félin, sa besogne achevée, se retourna, s'étira voluptueusement et s'allongea, fixant Lucie droit dans les yeux, calme et paisible, aussi paisible que le soleil levant du matin.
Une sorte de déclic se fit. Lucie ne savait pas ce que c'était, ne comprenait pas la portée de sa découvert, ni quelle était cette découverte, mais savait qu'elle avait son importance. Aussi resta-t-elle là, plantée au milieu de la rue. Un morceau de feuille volant vint se coller à sa botte avec un bruit spongieux, mais la jeune femme n'y prit pas garde.
Doré... Un chat ? Et ses armes ?
Sur le chemin du retour, Lucie se mit à courir en réfléchissant à toutes vitesse. Les crocs, les griffes... Elle vérifia mentalement le nombre de lettres sans trop oser y croire. Arrivée au bout du compte, elle redoubla de vitesse dans sa course.

Le cylindre en pierre entre les mains, Lucie sentait le sang battre à ses tempes. Le souffle court, elle attendit que les tressautements de son cœur se calme pour former doucement le mot griffes.
Elle tira délicatement sur les deux parties de l'objet, qui s'ouvrit avec un petit déclic. A l'intérieur, un simple morceau de vélin qui paraissait bien léger pour le secret qu'il contenait, ainsi que diverses pièces d'un métal inconnu et très léger. Le papier était couvert de croquis incompréhensibles aux yeux de novice de la jeune femme, qui sortit de sa chambre et se dirige lentement vers la forge, qu'elle rejoignit en traversant la cour intérieure du quartier général.
Elle pénétra doucement dans le bâtiment enfumé et surchauffé. Ortolan, le forgeron, qu'elle avait rencontré en se perdant et en s'introduisant dans armurerie, était penché sur son enclume à marteler un morceau de métal qui, vu sa forme, deviendrait sans doute une épée.
« Bonjour, lança-t-elle pour s'annoncer.
- Bonjour, Lucie, fit Ortolan en se retournant. Que puis-je faire pour toi ?
- C'est-à-dire que... j'ai... répondit-elle en en lui tendant le parchemin et les morceaux de sa main libre, l'autre toujours serrée sur le cylindre.
- Tu as trouvé la réponse à ton énigme ! »
Mais il n'attendit pas de réponse, et se plongea dans l'étude du parchemin en triturant les pièces.
« Oui.. dit-il après quelques instants. Je dois être capable de faire ça.
- Tu en as pour combien de temps ?
- Largement assez pour que Zara ait le temps de préparer ton intronisation en temps qu'Assassin à part entière.
- Tu veux dire que...
- Eh oui. Zoltan lui avait fait part de tes progrès.?e t'occupes de rien, je demanderai à un serviteur de la prévenir. Il te reste environ une semaine pour te préparer.
- Une semaine ? fit Lucie, surprise.
- Tu ne crois tout de même pas que le matériel d'un Assassin se trouve sous le sabot d'un cheval ? »

*

Lucie se rendit compte rapidement que le jour qui suivrait sa nomination serait celui de ses dix-neuf ans. Quelle vieille, songea-t-elle.
En faisant, pour la première fois, le nombre d'années passées depuis la capture d ses parents, Lucie se rendit compte qu'il y avait peu d'espoir, pour ne pas dire aucun, qu'ils soient toujours vivants.
Mais elle chassa bien vite ces mauvaises pensées. L'espoir fait vivre, se rassura-t-elle. Elle entreprit de se couper les cheveux, pour se changer les idées et paraître un peu moins négligée. Elle n'aurait pas voulu faire mauvaise impression. Elle les lia en une queue-de-cheval, et coupa d'un coup sec tout ce qui dépassait en-dessous de ses omoplates.
En contemplant le résultat – guère probant – dans le miroir, elle s'aperçut que ses traits étaient devenus plus anguleux. Moins enfantins, plus matures, dans une expression sérieuse qui ne lui ressemblait habituellement pas. Elle haussa les épaules, puis tourna les talons, dans l'intention d'aller manger. Midi était largement dépassé.

La semaine passa à la fois trop vite et trop lentement.
Trop vite, parce que Lucie savait qu'après le jour fatidique, elle devrait quitter le quartier général des Assassins à Bélakel ; elle se rendrait à Tuma... et découvrirait si ses parents étaient toujours vivants. Elle perdrait la sécurité de ce qui était, finalement, devenu un foyer. Elle serait... seule.
Trop lentement, car l'inaction la rendait nerveuse. C'était en leurs mains qu'était Bélakel. Et cela se sentait. L'argent changeait de mains à toute vitesse. Pour garder le contrôle et sauver les apparences, ils organisaient des distributions gratuites de pain pour les – nombreux – mendiants. Pourtant, assez souvent finalement, on en retrouvait assassinés dans les ruelles obscures, sans doute pour ne pas s'être écartés assez vite du chemin d'un riche noble. Les prétendus procès des bonnes gens étaient menés à toute vitesse, les accusés avaient déjà la corde au cou, au sens propre comme au figuré, la décapitation succédant parfois à la pendaison. La plupart des accusés n'avaient rien fait d'autre que dénoncer se qui se passait dans les bas-fonds de la capitale. Des banquiers, des dirigeants intègres disparaissaient « mystérieusement », aussitôt remplacés par ceux qui avaient suffisamment payé Tenkin pour pouvoir prendre leur place.

*

Enfin, le jour tant attendu arriva. Lucie se réveilla très tôt, une boule dans la gorge, avec l'impression d'étouffer. En ouvrant les yeux sur le plafond de pierre, elle se demanda un instant où elle était... puis s'assit, les mâchoires serrées.
Elle enfila ses vêtements, fourra ses pieds dans ses bottes et descendit dans la salle à manger pour déjeuner... Mais elle ne put rien avaler, trop tendue pour penser à son estomac – ou a son assiette.
« Tu sais, lui dit finalement Zara, la cérémonie se tient à minuit. Tu ferais bien de manger si tu veux tenir jusque là. »
Lucie ne répondit rien mais saisit un morceau de pain qui eut du mal à atteindre son estomac. Elle déglutit avec difficulté, l'impression de manger du béton.
Aussitôt après avoir fini de manger, Zara l'entraîna vers la pièce qu'elle appelait salon, mais qui n'était en fait qu'une grande salle pleine de fauteuils divers. En entrant, Lucie n'en crut pas ses yeux. La personne qu'elle désirait le plus voir au monde était là, à sourire tranquillement comme s'ils s'étaient quittés la veille au soir.
« Salut, dit nonchalamment le garçon.
- Enzo ! fit Lucie en lui sautant dessus et en le serrant dans ses bras. Tu m'as manqué ! Raconte-moi tout ! Qu'est-ce qui s'est passé après mon départ ? Vous avez réussi à repousser les ennemis ? Il y a eut des blessés ? Pourquoi es-tu là ? Et surtout, pourquoi tu souris comme ça ?
- Je dois répondre à tout, ou je peux choisir ?
- Très drôle, Enzo.
- Nous avons réussi à repousser les Gardiens, mais de justesse. Plusieurs de nos Assassins sont morts, et tout porte à croire que nos ennemis sont encore nombreux. Je suis venu ici parce que Zoltan m'a demandé si je voulais l'accompagner pour te voir... »
Ils échangèrent un silence gêné, puis se mirent à parler de tout et de rue, Enzo raconta à Lucie ses propres prouesses dura la bataille et à midi, elle avait oublié l'imminence de l'événement qui ferait d'elle un Assassin. Elle mangea de bon cœur au repas, et, au soir, elle regarda Enzo s'empiffrer en riant.
C'est un peu moins d'une heure avant minuit, lorsqu'un serviteur vint la chercher pour qu'elle enfile ses nouveaux vêtements, correspondants à sa fonction, que sa nervosité refit surface, comme trop longtemps contenue.
Elle prit bien soin de garder le collier, cadeau d'Enzo, qu'elle portait toujours comme une sorte de porte-bonheur, puis se rendit dans la salle à manger. La table avait été repoussée sur le côté, et Zoltan trônait au centre de la pièce, à côté d'une tas d'armes divers et d'un guéridon où était posé un petit coffret de bois.
Lucie remarqua, dans un coin sombre, les deux yeux brillants d'Enzo, qui la regardait avec attention. Juste à côté était assise Zara.
« Bienvenue, jeune apprentie. Réponds à mes questions ce que tu penses vraiment, pas ce qui pourrait me faire plaisir, ce que tu as entendu dire ou ce que l'on t'a appris. Pourquoi veux-tu devenir Assassin ?
- Pour défendre une cause juste et retrouver ma famille. »
Zoltan acquiesça et lui donna un poignard. Lucie comprit qu'à chaque fois qu'elle répondrait correctement une question, elle recevrait une nouvelle arme.
« Quelle est cette cause ?
- La liberté. »
Zoltan sourit. « C'était audacieux... Mais juste. »
Il lui remit une épée incrustée d'argent.
« Quelle arme possèdes-tu pour y parvenir ?
- L'espoir.
- Les Gardiens t'ont faite prisonnière. Tu es sous clef, à vingt mètres du sol. Pas d'allié, rien à portée de main. Que fais-tu ?
- Je m'échappe. »
C'était plus qu'audacieux. C'était... juste.
« Qui es-tu ?
- Moi.
- Il ne reste qu'un seul Gardien sur Kaïdza, où sont les autres ?
- En Enfer.
- Quelle est la meilleure arme d'un Assassin ?
- La surprise. »
Pour ces questions, il lui remit différentes armes, dont un boomerang que Lucie prit en grimaçant discrètement. Elle avait toujours une bosse sur le haut du crâne à cause de cet instrument de malheur.
Il ne restait désormais plus que le coffret de bois sur la petite table, humble et discret par rapport aux autres cadeaux.
« Jures-tu de protéger et de défendre notre cause, ainsi que tes semblables ?
- Oui.
- Dans ce cas, ferme les yeux. »
Elle ferma les paupières en tremblant légèrement. Les paumes qui effleurèrent ses mains furent très délicates, tandis qu'on lui enfilait ce qui semblait être des gantelets.
« Tu peux ouvrir les yeux. »
Alors que Lucie contemplait ses mains, elle ferma les poings en contractant ses muscles. Huit lames étincelantes jaillirent de ses gants.
« Bienvenue parmi nous, jeune Assassin. »


Dernière édition par Reflets de Lune le Lun 14 Mai - 15:37:59, édité 2 fois
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La Guilde des Assassins _
MessageSujet: Re: La Guilde des Assassins   La Guilde des Assassins I_icon_minitimeDim 13 Mai - 15:32:16

CHAPITRE 12 : LE DEPART


Zoltan s’opposa fermement à ce qu’Enzo accompagne Lucie dans sa quête. Selon lui, il n’était pas prêt. La jeune femme n’aurait jamais osé l’avouer, mais elle était soulagée que le garçon ne vienne pas. C’était son meilleur ami, et elle aurait bien trop peur qu’il ne soit blessé pendant un combat. Enzo fit la tête quelques heures, vexé que ses capacités ne soient pas reconnues, mais fini par se résigner. Ils se retrouvèrent sur le pas de la porte. Lucie, harnachée de pied en cap, adressa un sourire gêné à Enzo.
« Alors… Adieu, dit le garçon.
- Au revoir, Enzo, ce n’est qu’un au revoir », rit Lucie, en essayant malgré tout de se rassurer elle-même.
N’aimant pas les adieux, elle lui colla un baiser sec sur la joue, lui serra le bras droit dans une poigne étonnamment solide, puis monta sur Sylver, qui était désormais son cheval attitré.
Elle adressa un dernier sourire à Enzo, puis sortit de la cours du quartier général sans se retourner. Le claquement des sabots de son cheval sur le sol l’empêchait de penser que tout cela n’était qu’un rêve. Une petite brise fraîche lui ébouriffa les cheveux, et elle fut devant la porte. Elle rabattit sa capuche sur ses yeux, et passa l’arche.
Elle traversa Bélakel en réfléchissant à la manière dont elle pourrait localiser Tuma. La carte qu’elle possédait n’indiquait pas sa position précise ni à quoi la cité fortifiée ressemblait, mais ses parents devaient sans doute croupir dans une des geôles des bas-fonds du château.
Elle devrait donc se rendre à la cité voisine, Mankel, qui était le siège officiel de Tenkin, bien que celui-ci se cache bien à l’abri à Tuma. Bref, elle trouverait bien un dignitaire haut placé qui pourrait… coopérer en toute amitié pour lui indiquer l’emplacement de la cité.
C’est avec ces pensées à l’esprit que Lucie quitta Bélakel en direction de l’ouest.
Toutes les cinq minutes environ, elle ne pouvait s’empêcher de lever une main, de serrer le poing et de regarder les quatre griffes, une par phalange, jaillir en silence.
Elle ne savait toujours pas comment cela marchait, mais Ortolan, en lui rendant le parchemin, lui avait confié que celui qui avait inventé ça était un génie.
Elle détendit ses muscles, et les lames, d’une quinzaine de centimètres chacune, regagnèrent leur logement aussi sec.

*


Cela faisait maintenant plusieurs heures que Lucie chevauchait, et elle avait mal partout depuis que, alors qu’elle faisait une pause, Sylver s’était cabré subitement. Ses rênes s’étaient coincées dans les branches d’un arbre. Elle avait dû monter sur celui-ci et décrocher son cheval. Vu que l’étalon était retombé aussi sec sur ses antérieurs, et qu’elle tenait toujours les rênes, elle avait dégringolé de toute la hauteur de l’arbre, e recevant quatre ou cinq branches dans les côtes, ce qui n’avait jamais fait de bien à personne. Elle était tombée à califourchon sur Sylver… Mais le regard tourné vers la croupe. Affolé, celui-ci était parti au grand galop, emportant une Lucie quelque peu désorientée.
Quelques lieues plus loin, après avoir enfin réussi à calmer Sylver, elle s’était remise dans le bon sens en maudissant les arbres, les rênes trop solides, les chevaux, et surtout les trois ensemble.
Le voyage se déroula sans autre incident notable. La chaleur déclinante de cette fin d’été réchauffait suffisamment la terre pour que, le soir venu, Lucie ne s’enveloppe que d’une mince couverture. Elle aurait préféré pouvoir monter la garde, mais c’était difficile de dormir en même temps. Aussi se contentait-elle de somnoler, son épée à portée de main et jamais totalement dépourvue d’un morceau d’armure. Elle était sans doute paranoïaque, mais les cimetières étaient remplis de gens imprudents.
Le soir tombait. Comme elle n’était plus très loin de Mankel, elle décida de continuer, malgré les nuages noirs et menaçants. Un éclair traversa le ciel, le tonnerre gronda, et l’orage s’abattit sur la plaine. La jeune femme se rendit compte que, seul point surélevé, elle consistait en une excellent cible pour les éclairs.
Elle poussa Sylver au galop, lui qui ne demandait que cela, terrifié par le tonnerre et par les flashes lumineux. Couchée sur son encolure, Lucie se demanda quelle allure elle pouvait avoir, noire silhouette plaquée sur une silhouette plus noire encore, à galoper ainsi dans la nuit obscure brièvement éclairée de temps à autre.
Il se mi à pleuvoir, donnant au paysage un air encore plus chaotique. La fureur du ciel, qui semblait s’être contenue trop longtemps, était lâchée d’un coup déferlant sur la terre comme une vague d’une puissance inimaginable.
Enfin, Mankel apparut à l’horizon, telle une île de paix dans la mer déchaînée.
Un éclair trouva son chemin juste devant Sylver, mettant le feu à un buisson et obligeant l’étalon à sauter au-dessus pour échapper aux flammes.
La cité semblait se rapprocher à une allure qu’un escargot aurait qualifiée de pitoyable. Lucie se demanda un instant si elle n’était pas coincée dans l’un de ces rêves où l’on court mais où l’on avance pas. Mais non, e froid des gouttes sur son visage, le rugissement du vent, la lumière vive et imprévisible… Tout était trop réel.
Sylver donnait ses dernières forces dans la bataille contre la nature, certain qu’aussitôt arrivé, on le bouchonnerait pour le sécher et qu’il aurait à manger à satiété. Finalement, il n’avait pas tellement soif.
Enfin, la muraille de la ville remplit le paysage et le ciel. Grande, grise, faite de pierres cimentées entre elles par une pâte à la couleur douteuse, elle semblait imprenable. Lucie s’approcha de la porte… qui était fermée.
Elle jura le plus fort possible, rien que pour entendre le son de sa voix, puis frappa au battant de taille réduite comprit dans la grande porte. Personne ne vint lui ouvrir ; elle conclut qu’elle devrait se débrouiller seule. La muraille comportait de nombreuses prises… Sa décision fut prise en un clin d’œil.
Elle poussa Sylver au plus près de la porte, là où il serait un peu protégé de la pluie grâce au renfoncement, puis se hissa sur son dos. Elle se redressa rapidement en position verticale, puis agrippa les grosses pierres disjointes en priant pour qu’elles ne cèdent pas.
Elle se trouvait ainsi plaquée sur le mur perpendiculaire à la porte, et était protégée des gouttes de la taille de son poing fermé. Cela ne dura pas longtemps ; elle longea le mur jusqu’à se retrouver sur son côté extérieur, exposée à tous les vents. C’est là que la véritable ascension commença. Les doigts crispés sur les pierres d’entre lesquelles s’échappait le ciment, elle progressait centimètre par centimètre.
La pluie n’arrangeait rien. Après que Lucie ait passé la première moitié du mur, elle reçut une énorme giclée d’eau, la laissant encore plus trempée qu’avant, ce qui ne changeait finalement pas grand chose.
Heureusement, ses vêtements ne semblaient pas trop retenir l’eau. Sa seule peur était que le vent rabatte sa capuche. Si quelqu’un voyait sa capuche… Cette pensée la fit soudain sourire. C’était le milieu de la nuit, il pleuvait comme si c’était la fin di monde et elle était accrochée sur une muraille glissant à vingt mètres du sol. Elle rit comme une démente, le son de ces éclats couvert par le vent.
Elle posa soudain la main sur le rebord d’un créneau. Elle jeta un coup d’œil prudent. Il y avait un garde, mais avant qu’elle n’ait eut le temps d’esquisser un geste, il s’éloigna pour continuer sa ronde et se mettre au chaud le plus vite possible.
Lucie posa un pied sur le rebord du mur, s’arc-bouta pour monter se retrouva sur le chemin de ronde, épuisée par son ascension. Elle se plaqua sur le mur, et regarda vers la porte. Pas de garde. Sans doute que le personnel se trouvant à l’intérieur des murs se pensait suffisamment efficace. La jeune femme descendit une échelle, trouva son chemin vers la grande porte. Elle ouvrit le plus petit battant, passa le bras par l’ouverture, attrapa les rênes de Sylver et le tira à l’intérieur. Elle ferma le battant, et soupira.
Il pleuvait toujours aussi fort, mais le vent ne parvenait pas à pénétrer dans la cité.
Lucie se mit alors en quête d’une quelconque auberge pourvue d’une écurie et si possible pas trop habitée par la vermine.
Elle trouva finalement ce qu’elle cherchait dans un établissement nommé « Au Fringant Boudin », tenu par quelqu’un ayant apparemment un faible sens touristique. Lucie confia Sylver aux bons soins d’un garçon d’écurie insomniaque. Elle entra, parla au tenancier, insomniaque lui aussi, et, sans prendre le temps de manger, s’écroula sur le premier lit qu’il lui proposa.


Dernière édition par Reflets de Lune le Lun 14 Mai - 15:34:23, édité 1 fois
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La Guilde des Assassins _
MessageSujet: Re: La Guilde des Assassins   La Guilde des Assassins I_icon_minitimeDim 13 Mai - 17:01:17

CHAPITRE 13 : LE NOBLE DE MANKEL


Le lendemain matin Lucie enfila rapidement ses vêtements qui avaient séché. Elle passa une collection d’armes impressionnante à sa ceinture, puis rabattit sa capuche su son visage, ‘ombre sur ses yeux la rassurant plus que tout le reste réuni.
Elle paya l’homme du bar pour pouvoir rester dans l’auberge durant les jours à venir, puis sortit dans la rue.
Le calme nocturne, tout relatif à cause de l’orage, avait cédé la place au brouhaha diurne. Les marchands criaient, vantant leurs produits d’une voix forte, dans l’espoir de vendre un quelconque objet.
Il n’y avait pas de quartier général des Assassins à Mankel, sans doute parce que toute ville était sous les ordres de Tenkin, qui ne s’en cachait même pas. Et on ne s’installe généralement pas dans le camp des ennemis.
Lucie décida de se rendre sur la place centrale, juste en face de la statue géante de Tenkin. En s’y rendant, elle sentit tous les regards se poser sur elle, et se demanda pendant dix minutes pourquoi, avant de se rendre compte de l’erreur énormissimement énorme qu’elle venait de connaître ; se balader vêtue en Assassin dans une ville grouillante de Gardiens n’était pas le meilleur moyen de rester discrète, quoique, une fois qu’elle serait morte, elle serait discrète.
Elle devait parer au plus pressé, c’est-à-dire se fondre dans la masse, et rapidement si possible, enfin, si elle ne voulait pas mourir. Aussi se dirigea-t-elle discrètement vers une ruelle déserte, fauchant au passage un chapeau comme on les portait en Europe, dans le style des années 60. Elle se saisit également d’une tunique bleuâtre qui avait du connaître des jours meilleurs, et d’une ample cape grise.
Arrivée dans la ruelle élue, elle passa rapidement la tunique et fourra ses anciens vêtements dans son sac. Elle accrocha la cape à ses épaules, enfonça le chapeau sur sa tête. Elle avait à présent l’air normale, à ceci près qu’elle avait toujours ses gantelets-griffes.
Lucie se mordilla les lèvres, puis décida de ne pas se faire remarquer d’une autre manière. Elle se choisit un mur, fit jaillir ses griffes et commença à s’élever. C’était pratique. Si seulement tous les ciments pouvaient être aussi mous, elle ne ferait qu’une seule bouchée de toutes ces murailles !
Une fois en haut, elle marcha tranquillement vers la place, enjambant les espaces entre les toits, et en surveillant les rues.
C’était bien ce qu’elle avait pensé : les nobles les plus hauts placés s’y rendaient par petits groupes, pour parader et examiner la pauvreté ambiante ? Lucie repéra rapidement leur chef : le plus richement vêtu, le plus opulent et le plus volubile. Il ne lui serait pas difficile de le suivre, il suffisait d’éviter de se faire repérer.
Lorsque le riche troupeau eut fait le tour de la statue, il se sépara et commença à rentrer dans les demeures respectives chacun.
Lucie focalisa son attention sur sa cible, et ;a suivit en se tenant à une distance respectueuse.
En écoutant discrètement les conversations, elle avait appris qu’il s’agissait du très respecté - bien qu’il ne le méritât pas - Còleo de Leonne, qui avait fait fortune en vendant des épices.. Mais surtout en entretenant son équipage de corsaires dans l’Archipel du Sud.
En effet, la péninsule du Sud-Est était porteuse de nombreuses mines aurifères, et d’autres ressources, comme sa terre extrêmement fertile, mais elle se trouvait séparée du reste du continent par une chaîne de montagnes difficile franchissable. Les navires marchands quittaient donc Bazdez-Port, ville portuaire de la péninsule, chargés d’objets rares et précieux, d’épices très chères, et surtout, d’or et de pierres précieuses. De nombreux navires appartenaient aux Gardiens, mais pas tous. Pour les corsaires de Còleo de Leonne, il suffisait donc d’attaquer tous les navires ne portant pas l’emblème des Gardiens, et leur fortune était assurée. C’était également un endroit idéal pour les pirates indépendants. Les nombreux îlots entourés de récifs coralliens offraient des refuges idéaux pour ces repris de justice.
S’arrachant à ses pensées, Lucie se cacha juste à temps à l’ombre d’une cheminée. Lorsque Leonne jeta un cou d’œil distrait à un pigeon qui s’envolait. Elle poussa un soupir de soulagement, et continua à marcher sur son toit.
Soudain, il tourna brusquement vers une ruelle encore plus animée que la précédente, et Lucie, qui était sur le toit du mauvais côté, ne put retenir un juron rageur. Elle prit quelques pas d’élan et bondit sur une colonne au milieu de la rue. Elle enchaîna par un saut très large pour atterrir sur le toit d’en face.
Des badauds la montraient du doigt en chuchotant, mais la jeune femme n’en avait cure. Tout en balançant un chapelet de ses meilleurs jurons, elle chercha Leonne du regard. Par un miraculeux hasard, il s’était arrêté pour rabrouer un mendiant qui avait eut le malheur de se trouver sur son chemin. Elle reprit donc sa filature, plus attentive que jamais.
Enfin, Lucie arriva devant une grande bâtisse dans laquelle Leonne pénétra sans aucune hésitation. Elle s’assit sur son toit, et attendit.
Après plusieurs heures, Leonne n’étant toujours pas ressorti, Lucie en conclut que ce devait être sa maison. Elle eut – involontairement – un sourire carnassier, et descendit de son perchoir. Elle avait eu le temps d’examiner les lieux. Aussi, ce fut sans hésitation qu’elle s’agrippa au lierre d’une des façades et commença à se hisser vers le haut. Une détermination féroce l’empêchait de glisser. Ses griffes n’auraient pas pu la retenir, car le mur était recouvert d’une sorte d’enduit blanchâtre très lisse.
Parvenue à la première fenêtre, Lucie enjamba le rebord et se laissa glisser à l’intérieur. Elle traversa les couloirs, rasant les murs, à la recherche de Leonne et d’un endroit calme pour l’interroger. Elle échappa de peu au regard d’une vieille servante en se cachant derrière une colonnade. Après avoir fouillé le premier étage, elle se résolut à monter au second. Elle ne prit même pas la peine de vérifier le rez-de-chaussée ; c’étaient là que se trouvaient les cuisines et les pièces que l’on n’utilisait que rarement, quand on était riche.
Au deuxième semblait s’être rassemblée toute la richesse possible et imaginable. D’épais tapis rouges décoraient le sol, tellement beaux que Lucie avait un peu honte de poser ses bottes très relativement propres dessus. Les murs, agrémentés de tableaux divers, croulaient sous les ornementations les plus diverses. Plusieurs statues, faites de ce qui ressemblait à du marbre, étaient placées à intervalles réguliers. Enfin, de lourdes tentures de velours achevaient d’étouffer l’atmosphère déjà pas très aérée.
A cet étage, personne. On entendait seulement résonner les bruits de la rue, mais ils semblaient loin, comme dans un rêve. Retenant son souffle, Lucie ouvrit la première porte qu’elle trouva. La pièce ressemblait à une sorte de bibliothèque pleine de livres et de fauteuils. La jeune femme allait referme le battant lorsque quelqu’un toussa. Elle sursauta violemment. Leonne !
Lucie referma doucement la porte après être passée, et, dégageant son poignard, s’avança à pas de loup. C’était presque trop facile. Leonne était là, le dos tourné, en train de feuilleter un livre. Vu l’air de profonde stupidité qu’il dégageait, Lucie était presque étonnée d’apprendre qu’il savait lire.
La jeune femme retint un éternuement, posa la lame de son poignard sur la gorge grassouillette de l’homme, qui poussa une sorte de petit cri de terreur.
« Un mot, un cri, et tu es mort », souffla Lucie.
Elle contourna le fauteuil en poussant doucement la table, et se retrouva face à Leonne. Le visage pâle, la bouche légèrement entrouverte sur des dents jaunâtre, ses yeux globuleux partant dans tous les sens, il avait l’air plus stupide que jamais.
« Où es Tuma ? demanda crûment Lucie.
- Quoi donc ? mentit-il.
- Ne me prenez pas pour une imbécile, je sais tout à propos de votre petit commerce… euh… légalement douteux… avec Tenkin. Je sais pour vos corsaires, et j’ai l’intention de vous arracher l’emplacement de cette foutue ville, de gré, ou de force.
- Je… Je ne sais pas que quoi tu veux parler.
- Erreur fatale. Premièrement, vous allez arrêtez de me tutoyer, parce que je n’ai que du mépris pour vous, et surtout parce que c’est moi qui ait le poignard. Ensuite, sachez que je n’hésiterai pas à vous… chatouiller. Si vous ne parlez pas.
- Ouvrez le coffre en dessous de cette étagère avec cette clef », dit-il en sortant ladite clef de sa poche droite et en désignant une armoire.
Lucie lui arracha l’objet des mains, ouvrit la boîte et récupéra la carte de la forêt où Tuma était dissimulée. Elle se tourna ensuite vers Còleo de Leonne.
« Si ce n’est pas la bonne carte, je reviens, soyez en sûr. Je reviens, je vous coupe deux ou trois appendices inutiles et on en reparle . Deuxième chose… vous arrêtez immédiatement vos affaires dans l’Archipel du Sud. Si vous ne le faites pas, je le saurai. Je reviendrai. Et on reparlera des morceaux inutiles de votre anatomie. »
Leonne acquiesça, un peu de sueur perlant sur son front tandis qu’il regardait Lucie sortir par la fenêtre. Il se demanda depuis quand les Assassins portaient des chapeaux.

Lucie se dépêcha de regagner l’auberge du Fringant Boudin. Elle sella Sylver, empaqueta ses affaires, chipa une boussole, grappilla quelques provisions dont un excellent saucisson séché, puis traversa la vile, Sylver en main. Déjà, des Gardiens parcouraient les rues en interrogeant tous ceux qui passaient trop près d’eux.
La jeune femme fit profil bas, et parvint à sortir de la ville sans trop d’encombres, en montrant quelqu’un au hasard quand un garde voulut l’interroger à la sortie de la ville.
S’éloignant au grand galop, Lucie savoura la plaisir simple du succès.

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MessageSujet: Re: La Guilde des Assassins   La Guilde des Assassins I_icon_minitimeDim 2 Sep - 11:47:09

CHAPITRE 14 : TUMA


En suivant la direction indiquée par la sa boussole, Lucie parvint rapidement à rejoindre la forêt sans trop de problèmes, si l’on excepte la perte d’un saucisson à peine entamé et la chute malencontreuse d’un pain dans une flaque d’eau boueuse. Et quelques patrouilles de Gardiens distraits qu’elle n’eut pas trop de mal à éviter.
Lucie suivit ensuite la rivière Filante, qui devrait normalement l’amener à proximité de Tuma, du moins si ses constructeurs avaient respecté quelques principes de facilité et de logique de base, ce qui n’était pas garanti.
Le petit cours d’eau, qui portait bien son nom, filait entre ses rives faites de galets et de graviers. Les arbres bordant la rivière se firent peu à peu plus nombreux, plus serrés, plus grands. Lucie, qui pourtant d’habitude préférait se trouver à l’abri sous le couvert des feuilles, commençait –étrangement - à se sentir oppressée. Soudain, une branche craqua avec grand bruit à quelques pas derrière elle. Elle se retourna d’un coup sec. Un écureuil effrayé détala à toute vitesse.
Suivant consciencieusement le tracé indiqué sur sa carte, Lucie aperçut enfin la cité de Tuma. Jusque-là, elle s’était demandé pourquoi il fallait absolument savoir où elle était pour pouvoir s’y rendre. Mais désormais elle ne se posait même plus la question.
Les murs ceignant la ville avaient été peints en différentes nuances de brun et de vert, la rendant impossible à voir à moins de cinq mètres. De plus, ils étaient bordés d’arbres si serrés qu’il semblait n’y avoir aucune interruption dans les bois.
Lucie revint sur ses pas et attacha Sylver à une centaine de mètres de la ville, près d’un oint d’eau, et d’une énorme touffe d'herbe. L’étalon pourrait rester là quelques jours si besoin. Puis elle se rapprocha et examina le château, froidement concentrée. Les murs en étaient d’une sorte de grès graniteux, dépourvu des prises les plus infimes. Aucun point d’appui, aucun relief. Aucune fenêtre sur les murs à moins de vingt mètres du sols, et elles étaient toutes pourvues de barreaux énormes et très peu écartés. Aucun moyen d’y pénétrer.
Quoique… Se dit Lucie en réfléchissant. Il y avait les arbres.
Une force peut rapidement se transformer en faiblesse, conclut-elle en se dirigeant à grand pas vers le tronc qui lui semblait le mieux placer, un vieuc chêne aux branches épaisses.
L’ascension ne fut pas de tout répos. Il n’y avait finalement de grosses branches qu’au sommet, toutes les autres semblaient avoir été mystérieusement coupées, ne laissant que les branchettes les plus faibles. Cependant, son entraînement rigoureux permit à Lucie de surmonter cette difficulté. Elle lança un caillou avec une corde accrochée et se hissa à la force des bras, puis prit enfin appui près de la cime, à une vingtaines de mètres du sol. Elle était cependant deux mètres trop bas par rapport au sommet du mur, ce qui lui fit pousser un grognement de dépit. Elle était trop près du but pour échouer !
Lucie s’avança sur sa branche, aussi loin que son poids le lui permettait.
À présent, elle pouvait presque toucher le mur. Presque, un mot qui faisait toute la différence. Et si elle faisait le moindre mouvement trop brusque, la branche craquerait, et elle avait peu de chances de survivre à une chute pareille.
Risquant le tout pour le tout, elle fléchit les jambes et se prépara à sauter. La branche craqua horriblement lorsqu’elle s’élança, elle fut déséquilibrée et faillit se prendre le mur en pleine face. Elle donna cependant un coup de reins désespérés qui lui fournit l’allonge qui lui manquait, lui permettant de crochetter le haut d’un créneau. Un peu sonnée par le choc, elle cligna des yeux pour recouvrer ses esprits. Une seule pensée tournait dans sa tête, obsédante ; le bruit avait-il alerté les gardes, et ceux-ci viendraient-ils voir ce qui se passait ?
La légende de l’imprenabilité de la ville ne devait pas son mythe aux rumeurs, car quelques instants plus tard, deux hommes, l’épée tirée du fourreau, accourraient. Ils scrutèrent les environs avec méfiance, mais aucun ne remarqua Lucie, suspendue dans un minuscule accro du mur. Impossible à voir depuis le chemin de ronde.
Lorsqu’ils s’en allèrent, elle soupira de soulagement et se hissa péniblement sur la muraille. Elle jeta un coup d’œil rapide à droite, à gauche. De hautes tours faisaient les coins des murs, mais sur cette section il n’y avait personne. Elle siffla silemcieusement, impressionnée. Devant elle s’étalait la ville de Tuma, grouillante de vie det d’animation. Comme partout, il y avait des marchands, des artisans, des gens qui couraient partout, mais tout respirait une sorte d’atmosphère différente des autres villes. Quelque chose d’indéfinissable, quelque chose de remarquable au premier coup d’oeil cependant. La ville était pleine de petites maisons séparées par une mulititudes de ruelles obscures, qui rejoignaient toutes deux gand avenues traversant la cité de part en part. L’une d’elles conduisait droit au château, une dizaines de mètres sur la gauche par rapport à la position de Lucie, qui en prit la direction.
En fait, il n’y avait personne sur les chemins de ronde où sur les tours. Ils devaient être occupés en bas, car apparemment il yavait une sorte de fête, vu les lanternes allumées (en plein jour) et les bribes de musique qui venaient de la place principale. En se mêlant aux paysans, personne ne la remarquerait.
Elle descendit en prenant appui sur les toits, les murs divers et les devantures, et se retrouva au sol. Là, elle prit un air dégagé et se dirigea vers le château, concentrée cependant pour ne rien laisser échapper de sa peur. Le chemin fut heureusement un jeu d’enfant. Personne ne la remarqua personne ne l’interrogea, persuadés qu’ils étaient que personne ne venait à Tuma de son plein gré lorsque la personne en question n’était pas d’accord avec le régime en place. De plus, son air affairé lui donnait une aura pressée et sévère, ce qui faisait s’écarter les éventuels gêneurs.
Le haut du château, qui dépassait des murs, était peint en vert. Du plus mauvais goùut, mais efficace. Un escalier menait à la porte principale, où deux gardes étaient tout de même en faction. Le laisser-aller n ‘était donc pas complet, comme elle s’y attendait. Mais elle avait prévu le coup. Du haut de son chemin de ronde, elle avait repéré une petite porte dérobée, qui devait mener aux cuisines où à la blanchisserie.
La porte s’ouvrit en grinçant, et Lucie se retrouva dans un couloir sombre et légèrement malodorant. Ce qui, dans une existence parallèle, avait dû être un tapis de velours rouge achevait de se décomposer sur le sol.
Charmant,, songea Lucie en sondant les environs, qui étaient intégralement déserts.
Le couloir dans lequel elle se trouvait continuait tout droit d’un côté puis se perdait dans le noir. Lucie s’engagea du côté lumineux, l’obscurité ne lui disant rien qui vaille.
Il y avait ensuite un embranchement, ainsi qu’un escalier descendant vers le sous-sol. La jeune femme savait que les geôles devaient se trouver sous terre, aussi dévala-t-elle les marches quatre à quatre, et néanmoins en silence.
Elle descendit un bon nombre d’escaliers dans la demi-heure qui suivit, se perdant plusieurs fois dans les méandres du château, maos finit par se trouver sur le sol de terre battue annonçant le dernier sous-sol. Elle inspira pronfondément, excitée jusqu’au bout des cheveux.
La porte devant elle était fermée à double tour, mais par un fin grillage sur le dessus du battant, elle pouvait apercevoir des gens divers, dans des cellules diverses, avec des expressions diverses, sûrement parce qu’ils étaient promis à des sorts divers.
C’était une serrure à double-pointe, mécanisme demandant environ deux heures de crochetage à un voleur professionnel, ce qui voulait dire le triple pour Lucie. Il lui fallait la clef. Après deux secondes refléxion, elle soupira longuement et entreprit de remonter tous les escaliers qu’elle avait descendusun peu plus tôt, sans se perdre cette fois.
N’ayant pas le temps de se déguiser avec talent, elle rabattit sa capuche sur son visage, dissimula ses armes du mieux qu’elle le put, passa la porte et la referma derrière elle.
Dehors, la fête battait son plein. La musique résonnait contre les murs lisses, les échos des rires et des discussions se propageaient, la foule était nombreuse.
Lucie tenta de repérer un garde susceptible de posséder la clef des cachots. C’étaient général des gens gros, puisqu’ils ne couraient pas beaucoup et buvaient toute la nuit, bien habillés, avec un gros trousseau de clefs sur un côté, et pas frocément très intelligents.
Deux paysans dévoraient près du buffet. Une dame parée d’une belle robe parée du belle robe discutait avec son soupirant. Deux comploteurs… parlaient dans l’ombre. Une dizaine de personnes devant un orateur. Une scène de ménage. Un grand type gros, tout seul et à l’air stupide. Trois…
Un grand gros type à l’air stupide ?
Lucie l’observa plus attentivement. Il portait une sorte de casque enroulé d’un grand turban rouge. Très discret, ronronna-t-elle en entamant une procédure d’approche.
Elle évita la fontaine ornant le centre de la place, contourna le buffet et ses mangeurs, se glissa vfinalement juste derrière son objectif dans une ruelle.
Sa stratégie établi, elle feingit de vouloir écouter l’orateur, passa près du garde, le bouscula en s’excusant rapidement sans lui laisser le temps de voir son visage et continua son petit bonhomme de chemin, les clefs en poche.
Qui avait dit que Tuma était imprenable ?
Un imbécile ou un couard, sans doute, se dit une Lucie plus que satisfaite en tournant dans un ruelle.
Son euphorie diminua légèrement lorsque ressentit une petit piqûre au niveau du bras.
Les moustiques, toujours les moustiques ! Le responsable allait mourir dans d’atroces souffrances, dès qu’elle l’aurait retrouvé. D’un geste preste, elle occit le responsable, et le laissa tomber par terre, se débarassant d’un mouvement du doigt de la plume qui était restée collée à sa main. Elle…
L’interrogation fusa, obsédante.
Depuis quand les moustiques avaient-ils des plumes ?
Lucie jeta un coup d’œil rapide. Une petite fléchette emplumée de rouge gisait sur les pavés, et elle-même était dans la mouise jusqu’au cou, et même au-dessus d’ailleurs, sa tête n’allait pas se détcher de son corps et s’en aller en dansant la gigue.
La jeune femme avala salive et marcha encore un peu, l’air parfaitement dégagé. Elle dégaina son poignard, sachant qu’elle n’aurait pas la force de manier autre chose. Elle tourna brusquement à droite, pénétrant dans un jardinet envahi par les mauvaises herbes.
Elle avait déjà du mal à garder les yeux ouverts. Dans un sursaut de volonté, elle serra les dents et s’adossa au mur, mais impossible de tenir plus longtemps ; elle glissa lentement le long des pierres. Sa vision brouillée lui montra les gardes s’approchant déjà. Leurs silhouettes devinrent floues, et Lucie sombra finalement dans le monde des ténèbres.


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